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Par méconnaissance surtout, la presse suisse reste incapable d'informer objectivement sur l'armée

29 avril 2001


Armée suisse - BlickD

es "Joujoux pour 30 milliards", "Folies de l'armée" : une fois de plus, la presse suisse de boulevard rue dans les brancards et assène une volée de bois vert à l'armée, en s'appuyant sur une planification d'acquisitions à long terme détachée de son contexte.

Derrière les grands titres accusateurs et les petites phrases insultantes des "Sonntagsblick", "Matin" et autres "Dimanche.ch", se cache toutefois un amoncellement d'erreurs, de fausses interprétations et même de mensonges à proprement parler choquant.

«... l'interprétation des différentes acquisitions prévues témoigne d'une méconnaissance du sujet aggravée par des préjugés étonnants.»
«... l'interprétation des différentes acquisitions prévues témoigne d'une méconnaissance du sujet aggravée par des préjugés étonnants.»

Rien de plus éclairant qu'une étude de détail. Pour ce faire, nous avons retenu l'article du "Matin", co-écrit par Anne Dousse et Michel Zendali, et donc paru ce dimanche 29 avril. Inutile d'entrer en matière sur des questions d'éthique journalistique, puisque la présence d'un commentaire séparé n'empêche pas l'opinion des auteurs de côtoyer en permanence les faits présumés dans le corps de l'article.

Précisons par ailleurs que le document utilisé pour cet article, issue de la Division de la planification et indiquant les acquisitions prévues en matière d'armement jusqu'à 2015 pour un montant global de 30 milliards, ne fait l'objet d'aucune présentation. Or non seulement toute planification est par définition sujette à modifications, mais en plus la phase de consultation sur le Plan directeur de l'Armée XXI comme le résultat de la votation sur la révision de la LAAM auront une influence déterminante sur ce plan. Ce qui n'est nulle part précisé.

Mais c'est l'interprétation qui est faite des différentes acquisitions prévues qui mérite le plus le détour, tant elle témoigne d'une méconnaissance du sujet aggravée par des préjugés étonnants. Nous avons ci-dessous alterné les extraits de l'article (en brun) avec nos propres commentaires.

 

Le CV 9030 de Hägglunds, ici en version norvégienne (photo Roy Haaland)

484 millions - L'achat de 186 chars de grenadiers suédois avait été très contesté au Parlement, jusqu'à Pascal Couchepin lui-même. Au bout de plusieurs semaines de polémique, le crédit de 990 millions sera finalement voté en automne dernier. Cette deuxième tranche sera, à ne pas douter, aussi discutée que la première. Il apparaît en effet pour le moins contestable ou alors totalement inutile d'acquérir pareil matériel si l'on sait que quelques dizaines de chars Léopard sont entreposés sous vide et pour un coût faramineux dans des garages alpins, où ils attendent leur décrépitude technologique...

Il est navrant de propager ainsi le mensonge maintes fois utilisé de chars inutiles mis au garage, alors que c'est précisément la possibilité de réaliser des économies qui a conduit, en 1998, à ne fournir à la troupe que les chars nécessaires pour l'instruction habituelle des écoles et des cours de répétition. Qui peut croire qu'il soit moins coûteux de maintenir en permanence 370 Leopard en parfait état de marche plutôt qu'en mettre 148 sous cocon et davantage utiliser les autres? Et pourquoi la plupart des armées occidentales procèdent-elles également de la sorte?

L'achat d'une tranche de quelques 90 chars de grenadiers CV-9030 supplémentaires doit par ailleurs être évalué dans la conception de la défense dans l'Armée XXI, et notamment des 2 brigades blindées semble-t-il prévues: 270 CV-9030 et 370 Leo 2 paraissent une balance logique du point de vue militaire. Encore une fois, pourquoi les autres pays européens ont-ils également en cours des programmes de nouveaux chars de grenadiers? A moins que l'on imagine bâtir une partie de l'infanterie blindée de l'Armée XXI sur des M-113 vieux de 40 ans?


MLRS
600 millions - Ce projet d'achat de lance-fusées à longue portée (jusqu'à 300 km) tels qu'on en a vu à l'œuvre dans la guerre du Golfe échappe à toute raison. Car on ne voit raisonnablement pas la Suisse se retrouver dans la situation de devoir s'en servir. Et qui plus est, seule. Il est l'un des signes les plus criants que les stratèges militaires suisses conçoivent désormais une armée pour elle seule.

Le propos frise ici le ridicule. Les lance-roquettes multiples (M-270) constituent en effet l'artillerie opérative, capable de tirer aussi bien des roquettes par salve de 24 à une portée de 45 km que 2 missiles ATACMS dont la portée maximale sera de 300 km. L'affirmation "l'un des signes les plus criants que les stratèges militaires suisses conçoivent désormais une armée pour elle seule" s'oppose à toute la stratégie de l'Armée XXI, et notamment la possibilité offerte au Conseil fédéral de coopérer avec d'autres nations dans des cas de défense: la nécessité d'une telle portée s'explique uniquement par le besoin de mener le combat aussi tôt que possible, sur le sol étranger, pour éviter des dégâts sur le sol national. Comme plusieurs pays européens possèdent déjà maintenant une telle arme, un tel achat représente en fait un facteur d'intégration dans une défense européenne.


910 millions - L'achat d'une nouvelle série de véhicules Movag de la série 8/8 (la firme qui les fabrique est désormais en mains canadiennes) pour la mécanisation de l'infanterie semble faire sens d'autant qu'elle a été réduite de 578 unités par rapport aux intentions initiales des militaires.

Les véhicules "Movag" ici décrits sont bien entendu des chars de grenadiers à roues 93 produits par la sociéte suisse Mowag. L'avis des auteurs est sur ce point pertinent, puisqu'il s'agit de mécaniser tous les bataillons nécessaires à la formation des brigades d'infanterie (550 Piranhas 8x8 ont jusqu'ici été achetés). Mais il fallait aussi préciser que l'achat de chars de grenadiers à roues s'inscrit également dans un mouvement européen, puisque de nombreux pays (Danemark, Suède, Irlande, Pays-Bas, etc.) achètent ce genre de véhicules polyvalents dans la double perspective d'un combat mené de manière mobile et de missions de soutien à la paix, au même titre que la Suisse.


80 millions - L'achat de munition dite intelligente (équipée d'électronique) pour l'artillerie ne répond pas à l'élémentaire clause du besoin, sachant que la Suisse dispose déjà d'une force de feu disproportionnée à son territoire. Le principe de précaution et d'autonomie militaire touche vers l'absurde.

Les auteurs démontrent ici leur méconnaissance flagrante de l'évolution de la chose militaire, puisque les opérations militaires modernes s'appuient sur la précision du feu et non sa puissance. Il ne s'agit pas ici d'acheter des obusiers supplémentaires, mais bien de meilleures munitions. Par ailleurs, les auteurs oublient de mentionner que notre artillerie ne dispose d'aucune munition intelligente, c'est-à-dire dotée d'un autodirecteur, par opposition aux lance-mines (munition Strix) dont la portée se limite cependant à 8 km.


330 millions - L'instruction des troupes mécanisées se fait toujours davantage à l'aide d'appareils de simulation qu'il faut évidemment renouveler. Mais l'armée suisse peut-elle se permettre ce luxe dans tous les domaines? Sachant que ces appareils ne servent qu'à l'instruction, ne pourrait-elle pas imaginer de collaborer avec un autre pays pour leur acquisition? Ne vote-t-on d'ailleurs pas sur ce sujet le 10 juin?

Une fois de plus, les auteurs sont à côté du sujet. C'est précisément parce que l'armée suisse veut davantage collaborer avec d'autres pays pour l'instruction que de nouveaux simulateurs s'imposent! En effet, les simulateurs sont la seule monnaie d'échange que nous pouvons utiliser avec d'autres nations, en échange des vastes espaces qu'ils peuvent mettre à la disposition de nos bataillons.

Par ailleurs, les auteurs oublient de mentionner que notre infanterie mécanisée ne dispose d'aucun système tactique indoor de simulation pour les cadres (à la différence des troupes mécanisées et légères) et que nos simulateurs de terrain ne reproduisent pas toutes les armes (manquent notamment les mitrailleuses, les lance-mines et l'artillerie, les charges dirigées et les grenades). Plusieurs autres pays entreprennent d'ailleurs de tels investissements; c'est par exemple le cas de la France, qui vise également à compléter ses systèmes (les armes antichars françaises n'ont pour l'heure pas de simulateur). Un système complet et compatible avec d'autres permettra des exercices à double action ("force on force") avec d'autres nations!


2,6 milliards - Cette somme comprend d'autres achats comme celui de nouveaux missiles Rapier (293 millions), de chars pour le génie (200 millions) ou de chars-ponts (166 millions). Dans son document, le DDPS explique qu'il entend aussi se doter d'un système de liaison pour le renseignement (200 millions) dont on ne sait pas grand-chose. Quant à la rubrique joliment et administrativement intitulée "achats en dessous de 70 millions", elle totalise 387 millions.


A propos d'un système de liaison pour le renseignement, il paraît évident qu'il s'agit d'un système de commandement et contrôle informatisé, ce que l'on appelle parfois "Internet tactique" et que toutes les armées occidentales sont en train d'adopter et d'installer dans leurs formations de combat. A tel point même que ces programmes constituent la pierre de voûte de tous les efforts de modernisation, dans le sens où ils multiplient de manière drastique l'efficacité des formations militaires. Pourquoi dès lors ne pas en informer le lecteur?


Drone 95
1,2 milliard -
Les militaires suisses ont une foi sans limites dans les drones, ces avions espions sans pilote mais télécommandés qui survolent les territoires ennemis, notamment après un tir d'artillerie pour constater les dégâts. Malgré les problèmes posés par la première série de ces appareils (les fréquences utilisées pour les commander à distance interféraient avec celles de l'aviation civile), ils veulent en acquérir d'autres, en deux temps. Un premier crédit de 650 millions servirait à acheter une nouvelle génération d'appareils. Une deuxième d'un montant de 500 millions irait à l'acquisition de drones armés. Sur la philosophie qui préside à l'achat de ces appareils, une seule question: quel sens cela a-t-il à l'heure où des satellites sont capables de savoir quelle marque de vodka consomme la nomenklatura russe de l'après-communisme? Mais là encore, il faudrait évidemment admettre de collaborer avec d'autres armées pour acquérir du renseignement...

Nous avons passons ici aux objets prévus au-delà de 2010, et soumis donc à une hypothèque encore plus grande. Mais bis repetita, les auteurs manquent complètement le coche. Non seulement ils se prêtent à des suppositions complètement ridicules sur la performance des satellites, dont les meilleurs sont de toute manière en mains exclusivement américaines (et ont une définition de 10 cm), mais en plus ils ne saisissent pas le rôle des drones dans le combat moderne. Avec quoi peut-on donc guider des tirs à 300 km, si ce n'est avec des drones, comme le font toutes les armées occidentales équipées de lance-roquettes multiples?

Les satellites géostationnaires sont incapables de fournir des images utilisables pour les missions de feu opératives, car ils ne peuvent identifier des cibles, et les satellites d'observation ont une trajectoire en orbite basse qui ne leur permet pas d'assurer une surveillance dans la durée d'un secteur donné. Les avions de reconnaissance sont de moins en moins utilisés, car ils courent des risques considérables, alors que les avions et hélicoptères équipées de radars terrestres (JSTARS, Horizon) travaillent plutôt à un niveau stratégique. L'utilisation de drones au niveau de la brigade pour le feu opératif – avec des radars de contre-batterie – devient un standard dans la doctrine actuelle de l'OTAN. Cet achat favorise donc l'interopérabilité, au contraire de ce qui est sous-entendu.


875 millions - Ce crédit devrait servir à renouveler une part considérable de la flotte des véhicules de transport. Rien à dire: les camions, ça s'use.

La liberté de la presse a beau pour sa part ne s'user que lorsque l'on ne s'en sert pas, sa crédibilité n'en pâtit pas moins si le propos librement tenu ne repose sur aucune connaissance. Un analyste militaire un tant soit peu averti aurait souligné l'importance de véhicules blindés pour la logistique des brigades de combat, leur éventuelle protection contre les mines et leur intégration complète dans un système de commandement et contrôle informatisé.


Leopard 2 Suedois
496 millions - Coûteuse fierté nationale, les chars Leopard finiront bien par s'user, même si l'on ne s'en sert pas (en tout cas pas de la totalité). Ce crédit devrait servir à les "rafraîchir", soit à changer leur blindage et peut-être même leur moteur en conservant le châssis originel. Les Leopard sont à la pointe de la technologie et serviront encore quelques années. Sachant que la probabilité d'un conflit est prévisible une quinzaine d'années à l'avance, on peut attendre la montée des tensions avant d'engager une pareille somme à l'amélioration de blindés.

Une fois encore, certaines suppositions ahurissantes. Non, les Leopard ne sont pas à la pointe de la technologie: ils sont excellents du point de vue mécanique et optique, mais totalement dépassés du point de vue électronique. Si l'Allemagne et les Pays-Bas se sont lancés dans la modernisation de leurs Leopard, c'est précisément pour les mettre à jour, leur incorporer les moyens informatiques de commandement et contrôle nécessaires à un engagement de précision, ainsi que les systèmes d'autoprotection rendus indispensable par l'évolution des munitions intelligentes de l'artillerie.

Par ailleurs, attendre encore 15 ans de plus pour moderniser les Leopard aurait certainement un coût largement supérieur, puisque plus personne ne ferait de telle modernisation, c'est-à-dire le passage des Leo 2A4 à la version 2A6 et plus, et que les chars auraient plus de 30 ans et seraient clairement en fin de vie. Les auteurs oublient encore une fois de mentionner que disposer de chars identiques à nos voisins (Allemagne, Autriche, mais aussi Espagne) permettrait de renforcer la capacité de coopération de l'armée suisse, dans l'instruction comme à l'engagement.


435 millions - Autre fierté nationale, la flotte des 34 F/A-18 que l'armée aimerait compléter en achetant 12 ou 14 nouveaux appareils. Cette acquisition est prévue en deux temps et en autant de tranches (245 et 190 millions). Problème, McDonnell Douglas ne fabrique plus la série acquise par la Suisse. Cette dernière pourrait alors se rabattre sur des avions "d'occasion" achetés à des armées étrangères ou sur une autre série. Mais de ce projet, en soi louable, découle une difficulté administrative et matérielle tout à fait délicieuse: les cavernes chargées d'accueillir ces engins à l'empennage plus large seraient trop étroites...

On n'épiloguera pas sur le fait que notre flotte de F/A-18 compte 33 appareils, depuis le crash de 1998. Il est en revanche exact que l'abandon d'un achat de F/A-18 supplémentaires dans les années 90 pose aujourd'hui un problème de taille. Mais ce ne sont certainement pas 12 F/A-18 de plus qui vont permettre d'envisager une défense autonome de la Suisse, là où des membres de l'OTAN comme le Danemark ou la Belgique ont pour leur part respectivement 69 et 100 avions de combat modernes. Pour les Forces aériennes suisses, l'intégration à une surveillance/défense de l'espace aérien commune relève de l'évidence, et est renforcée par tous les exercices effectués à l'étranger avec des armées étrangères.


4 milliards - Les avions ne sont pas éternels. L'armée suisse songe donc déjà à la prochaine génération d'appareils. Le commandement des troupes d'aviation ayant estimé qu'il n'était pas bon de dépendre d'un seul fournisseur, l'armée s'intéresse à au moins deux modèles: l'avion européen, mais aussi celui que conçoivent deux avionneurs américains (Lockheed et Boeing) et que dans le jargon on nomme l'avion mondial, appareil à décollage vertical et polyvalent.

Là encore, la mise en perspective – le remplacement des F-5 Tiger – est complètement absente du propos et tend à présenter l'acquisition comme déraisonnable par définition. Les informations concernant le Joint Strike Fighter, dont Lockheed et Boeing sont concurrents, sont d'une inexactitude déroutante, ce d'autant qu'une revue générale des acquisitions menée actuellement par le Pentagone risque bien de faire passer le JSF à la trappe... au profit du F/A-18 (Super Hornet) et du F-22 Raptor !


2,5 milliards - Ce poste considérable pourrait être consacré à l'acquisition d'un système de défense antimissile . Mis en évidence par la Commission Brunner, le péril d'une attaque de la Suisse par ce moyen est donc pris très au sérieux par les militaires. Mais songent-ils vraiment à un système autonome ou à la participation de la Suisse à un programme de défense antimissile européen? Le montant budgétisé semble indiquer qu'on penche plutôt pour la première hypothèse.

La supposition est ici complètement absurde. Croit-on vraiment que la Suisse pourrait avec 2,5 milliards assurer une défense antimissile autonome, là où certaines études européennes estiment un tel système à plus d'une dizaine de milliards pour une petite surface? De toute évidence, un tel montant serait adapté à l'eventuel "quote-part" fourni à terme par la Suisse à un système européen. Pour en revenir aux faits, les auteurs auraient au moins pu préciser que le Plan directeur de l'Armée XXI mentionne une décision future à prendre par le pays ces prochaines années à ce sujet.


900 millions - Ce crédit considérable devrait servir à contenter le dernier fantasme des militaires suisses: l'achat d'hélicoptères de combat qui pourraient être des Apache américains ou des Mangusta italiens. L'efficacité au combat et la mobilité de ces appareils sont extraordinaires, en particulier dans les plaines où déferlent des blindés. Seul problème: ce type de terrain existe peu en Suisse. A moins qu'on rase les Alpes.

Même si l'on omet le dénigrement puéril dont les auteurs font preuve, leur affirmation s'oppose à toute logique militaire, et est contredite par les principes d'engagement de l'OTAN en Europe. En effet, les hélicoptères de combat ne sont pas les plus efficaces dans des "plaines où déferlent des blindés", où seule une supériorité aérienne totale (Irak) permet d'empêcher leur destruction par l'aviation adverse, mais sont en revanche particulièrement adaptés au relief du Plateau suisse, comprenant un grand nombre d'habitations et une végétation assez abondante, c'est-à-dire de nombreux couverts pour de tels appareils. Par ailleurs, le montant mentionné (900 millions) ne devrait pas permettre le cas échéant d'acheter beaucoup d'hélicoptères Apache (Israel a payé 500 millions $ pour 9 Apache); l'acquisition d'appareils plus polyvalents et moins chers, hélicoptères de transports armés, apparaît plus probable.

 

Conclusion et questions

N'en jetons plus ! Un tel article est évidemment regrettable. D'une part, une fois encore on transmet au public des informations erronées sur notre armée, on véhicule des clichés pour le moins usés - les militaires dépensiers et bornés - sans faire preuve d'une clairvoyance et d'une pertinence particulières. D'autre part, une fois encore on traite le sujet militaire en dilettante, privilégiant le sensationnalisme et les verdicts sans appel, mélangeant les faits et les commentaires, au lieu d'informer de manière complète et de replacer l'information dans son contexte - ici la modernisation des armées européennes et la marche vers l'interopérabilité de l'armée suisse.

Il serait toutefois faux de condamner la presse suisse dans son ensemble, puisque le même sujet a été couvert de manière bien plus sérieuse par d'autres médias nationaux. Cela ne peut toutefois nous empêcher de soulever certaines questions en matière de communication :

  • Comment se fait-il que le DDPS continue à souffrir de fuites manifestement organisées, puisque des médias de groupes concurrents (Ringier et Edipresse) s'en font l'écho le même jour ? Voir une administration militaire incapable de maintenir un minimum de confidentialité sur des documents pouvant prêter le flanc à une critique facile est pour le moins inquiétant.
  • Pourquoi notre armée reste-t-elle incapable de développer et de communiquer une vision de la manière avec laquelle elle entend remplir ses missions, c'est-à-dire une perspective à long terme indiquant ses choix en matière de doctrine ? Il est évident que les chiffres d'un budget déconnecté de ses objectifs sont en soi extravagants.
  • Pourquoi enfin laisse-t-on des organismes planifier des acquisitions majeures jusqu'en 2015 alors même que les décisions concernant l'Armée XXI n'ont pas encore été formellement prises, et encore moins celles concernant l'après 2010 ?

 

Le jour où les responsables de la défense – politiques et militaires – comprendront qu'en matière de communication la seule limite à la transparence doit être la sécurité opérationnelle, nous aurons franchi un grand pas vers la modernisation de notre armée.




Cap Ludovic Monnerat    





Sources

Articles Le Matin, Dimanche.ch, Sonntagsblick


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