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Le Japon révèle sa puissance militaire et envisage de développer l'arme nucléaire

15 juin 2003

Navire japonaisD

ans quelques semaines, le Parlement japonais devrait rapidement approuver trois lois qui vont concrètement altérer la constitution pacifiste ayant guidé l'île depuis la fin de la Seconde guerre mondiale. Cette décision inquiète la Chine et la Corée du Nord, et elle souligne que le Japon pense à nouveau faire montre de sa puissance militaire – déjà plus grande que la plupart des gens ne l'ont réalisé.

Les vainqueurs du dernier conflit mondial, menés par les Etats-Unis, avaient décidé que – comme l'Allemagne – le Japon n'aurait plus jamais l'occasion de redevenir une menace militaire. L'article 9 de la constitution japonaise d'après-guerre stipule que "le peuple japonais renonce pour toujours à la guerre en tant que droit national souverain… Les forces terrestres, maritimes et aériennes, de même que tout autre potentiel de guerre, ne seront jamais entretenues."


«... Si le Japon choisit l'option nucléaire dans une confrontation avec la Chine, l'Occident pourrait amèrement regretter le jour où les Nippons été forcés de réarmer. »


Bien qu'elle ait été imposée par les Etats-Unis, la "constitution de paix" japonaise a trouvé un écho profond au sein de la population nippone ; la défaite d'août 1945 a mis un terme à une guerre de 14 ans, menée depuis 1931 en Chine, et qui avait fait presque 3 millions de morts militaires et civils.



Un budget de 50 milliards

Cependant, à peine une année après l'entrée en vigueur de la nouvelle constitution, les Etats-Unis ont commencé à systématiquement démanteler les articles antiguerres, sur lesquels ils avaient initialement insisté. Ce retournement fut la conséquence de la guerre froide naissante, quand les Américains ont réalisé que l'emplacement stratégique du Japon lui conférait une importance essentielle dans la lutte anticommuniste en Asie. La force croissante de la gauche japonaise menaçait également la viabilité à long terme des bases américaines dans ce pays.

La première étape du réarmement japonais a commencé par une décision secrète du Conseil de Sécurité Nationale (National Security Council, NSC), en 1948, autorisant la création d'une "force de police nationale" de 150'000 hommes, dont les missions comprenaient la protection des bases américaines au Japon et des familles des militaires américains. Avec l'éclatement de la guerre de Corée en 1950, une réserve de police nationale de 75'000 hommes fut ajoutée. Ce furent les premiers pas vers ce que les Etats-Unis espéraient, à savoir une force de 300'000 hommes, commandée par des anciens officiers impériaux japonais et prêts au besoin à être déployés en Corée.

Le gouvernement japonais a initialement rejeté aussi bien la force plus vaste et le déploiement en Corée. Toutefois, après le Traité de paix de San Francisco de 1951, il accepta de conclure une alliance militaire avec les Etats-Unis, permettant aux bases US de rester indéfiniment au Japon. De même, il promit "d'assumer de manière croissante la responsabilité de sa propre défense contre des agressions directes et indirectes" - violant l'esprit, sinon la lettre, de l'article 9 de la constitution.

Depuis cette époque jusqu'à maintenant, il y a eu un effort concerté, alimenté par les gouvernements japonais et américain, pour restaurer le Japon dans le statut d'une puissance militaire moderne, bien que fermement sous contrôle militaire US et liée aux objectifs stratégiques de Washington.

En 1973, les Forces armées japonaises, désignées par l'euphémisme de "forces d'autodéfense" (jieitai), étaient déjà devenues les septièmes plus puissantes du monde. Mais sans armes nucléaires propres, le Japon restait en définitive dépendant du parapluie nucléaire américain.

Aujourd'hui, le Japon compte 240'000 hommes et femmes sous les drapeaux. Après avoir dépensé presque 50 milliards de dollars par an pour la défense depuis 1998, Tokyo a une force inférieure uniquement aux Etats-Unis – au moins en termes de financement. Et le Japon fait tout ceci en préservant une constitution qui affirme que "le droit de belligérance ne sera pas reconnu à l'Etat."



La voie de l'arme nucléaire

Il serait faux d'imputer la montée en puissance militaire japonaise aux seules pressions américaines ; il y a toujours eu des leaders politiques sur l'île qui détestaient les articles qu'ils considéraient comme émasculatoires de la constitution. Mais malgré des tentatives répétées, ils ont jusqu'ici échoué à convaincre une majorité de votants d'éliminer l'article 9 par une révision constitutionnelle. Frustrés, ils ont à la place annulé ses clauses par l'emploi d'euphémismes, de subterfuges et de changements progressifs.

Sans surprise, le parti conservateur qui dirige le Japon reconnaît que sans armes nucléaires, le pays restera dépendant des Etats-Unis. Dans une déclaration hautement controversée, Yasuo Fukuda, le premier secrétaire au sein du gouvernement de Junichiro Koizumi, a exprimé son insatisfaction face à cette situation le 31 mai 2002 : "Attendu que nous avons atteint le stade de discuter une révision constitutionnelle, il pourrait bien s'avérer que, selon l'évolution de la situation internationale, la population japonaise décide que nous devrions avoir des armes nucléaires… Je pense qu'il n'y a rien dans la constitution ou dans la théorie légale qui stipule que nous ne puissions pas posséder de telles armes."

Même les principaux chefs de l'opposition japonaise partagent à présent ces sentiments. En avril 2002, le leader du parti libéral Ichiro Ozawa a affirmé que le Japon pourrait facilement produire "des milliers d'ogives nucléaires" en réponse à la puissance militaire croissante de la Chine. "Si la Chine devient trop influente", a-t-il remarqué, "les Japonais vont devenir hystériques. Il nous serait aisé de produire des têtes nucléaires – nous avons du plutonium. Si nous sommes sérieux, nous ne serons jamais battus en terme de puissance militaire." 

Comme le suggèrent les remarques de M. Ozawa, c'est la puissance économique et militaire de la Chine qui à long terme alimente au Japon le débat sur l'acquisition d'armes nucléaires. Grâce aux exigences de la guerre froide, le Japon n'a jamais entièrement admis, ni même compensé, les atrocités commises par ses troupes en Chine durant la Seconde guerre mondiale. Les responsables des gouvernements japonais ont de manière répétées nié des barbaries comme le Viol de Nanking de 1937 ou l'usage d'armes biologiques pour tuer près de 250'000 civils et 12'000 prisonniers de guerre.

Bien que la Chine est perçue comme une menace à long terme, le danger le plus immédiat provient d'une Corée du Nord nucléaire. C'est uniquement cette menace qui a conduit le mois dernier la chambre basse du Parlement japonais à voter trois "projets de loi dans l'éventualité d'une guerre". Ils permettent au Premier ministre de mettre la nation sur pied de guerre même s'il n'y a rien d'autre qu'un "crainte qu'une telle attaque peut se produire." Comme le chef du département de la défense, Shigeru Ishiba, l'a précisé durant le débat parlementaire sur ces arrêtés, ceci inclut la possibilité que le Japon puisse mener une "frappe préemptive" contre toute nation suspectée de préparer une attaque.

Les Forces armées japonaises manquent d'armes offensives, comme les missiles de croisière Tomahawk à capacité nucléaire. Mais elles ont commencé à évaluer leur acquisition. A court terme, le Japon va sans doute rester un allié solide des Etats-Unis et un membre actif de la "coalition des volontaires." Toutefois, si le Japon choisit l'option nucléaire dans une confrontation avec la Chine, l'Occident pourrait amèrement regretter le jour où les Nippons été forcés de réarmer.



Texte original: Brian Victoria, "Japan reveals its military might", Globe and Mail, 5.6.2003    
Traduction et réécriture: Maj EMG Ludovic Monnerat
    









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