Force opérationnelle interarmées 2 :
les commandos secrets du Canada
30 janvier 2003
i la vérité est l'une des premières victimes de la guerre, le secret est l'une de ses premières exigences. Un bon exemple de cet adage n'est autre que l'unité commando d'élite du Canada, qui est si discrète que les autorités canadiennes hésitent même à la qualifier comme telle. Mais les Etats-Unis connaissent bien la Force opérationnelle interarmées 2 (FOI 2) du Canada, et ils ont été tellement impressionnés par ses performances en Afghanistan qu'ils ont demandé son engagement pour toute campagne en Irak.
La FOI 2 est constituée de volontaires provenant des trois branches des Forces armées canadiennes. Elle a été formé en 1993 en reprenant les missions contre-terroristes de la police montée royale canadienne ; ses effectifs sont censés s'élever à 350 membres, et elle est basée au centre d'entraînement de Dwyer Hill, dans une région rurale à l'ouest d'Ottawa.
«... Les forces spéciales canadiennes sont sélectionnés et entraînés aussi rigoureusement que d'autres formations d'élite dans le monde, y compris le SAS britannique. »
Le budget annuel de la FOI 2 est fixé à 25 millions de dollars canadiens, bien que le Ministre de la Défense John McCallum espère l'augmenter. La moyenne d'âge des commandos de la FOI 2 est de 28 ans, et ces hommes d'expérience sont reconnus comme spécialistes du combat par temps froid, grâce à leur entraînement intensif dans l'Arctique canadien.
Expérience en Afghanistan
Les membres de ces forces spéciales canadiennes sont sélectionnés et entraînés aussi rigoureusement que d'autres formations d'élite dans le monde, y compris le Special Air Service (SAS) britannique et la Force Delta américaine. Les exigences pour ces deux unités s'appliquent probablement aussi à la FOI 2, ce qui signifie qu'un quart des volontaires – des soldats de première ordre – sont habituellement rejetés, et qu'un dixième de ceux qui continuent incorporent finalement l'unité d'élite.
Ce genre de formation est destiné à agir discrètement et avec une force mortelle dans des points chauds proches ou éloignés. Ses hommes sont entraînés à descendre d'une corde à partir d'un hélicoptère, à opérer isolément pendant des mois ou à rompre la hanche d'un combattant par un coup de pied au fémur. Ils devraient jouer un rôle vital dans une éventuelle campagne en Irak, spécialement dans des combats de rues à Bagdad.
En raison du mutisme des autorités canadiennes, l'essentiel de ce que nous savons de la valeur de la FOI 2 provient de sources américaines. Pendant la campagne d'Afghanistan, la FOI 2 faisait partie d'un groupe de forces rassemblant des forces spéciales de 7 nations différentes, la task force K-Bar ; celle-ci a pris part à 42 missions de reconnaissance et de surveillance, ainsi qu'à des opérations que les militaires américains décrivent comme de "l'action directe". Les membres de la FOI 2 ont participé à des opérations commando qui ont capturé 107 chefs taliban et tué au moins 115 combattants des Taliban ou d'Al-Qaïda, le tout sur une période de 6 mois.
«... La seule référence directe aux actions de la FOI 2 en Afghanistan était une photographie montrant des commandos escortant sur un tarmac des prisonniers d'Al-Qaïda. »
Les opérateurs de la FOI 2 ont conduit l'escalade d'une montagne en Afghanistan pour atteindre un poste d'observation à haute altitude. Ils ont également fouillé des caves à la recherche de forces ennemies et de renseignements. Dans le cadre de l'opération Anaconda, qui s'est déroulée en mars 2002, les commandos canadiens ont pris position sur les sommets afghans pour renseigner les unités de combat en contrebas.
Les hommes de la FOI 2 ont opéré conjointement avec les SEALs de la Marine américaine et avec les SAS australiens. Le commandant Kerry Metz de la Navy, en charge des opérations pour la TF K-Bar, a loué la performance des commandos "étrangers" durant une audition au Congrès. "Nous avons eu la chance d'avoir les meilleurs opérateurs d'une coalition de sept nations", a déclaré Metz. "Nous les avons mis au défi d'effectuer des missions dans certains des environnements les plus hostiles que nous ayons connus. Par exemple, nous avons engagé des équipes de reconnaissance dans les montagnes afghanes au-dessus de 3000 mètres, sans aucun ravitaillement pendant des périodes prolongées."
Avant cela, la seule référence directe aux actions de la FOI 2 en Afghanistan était une photographie embarrassante, montrant des commandos escortant sur un tarmac des prisonniers d'Al-Qaïda. Elle déclencha un tumulte parlementaire et une enquête pour savoir pourquoi le Ministre de la Défense de l'époque, Art Eggleton, n'avait pas immédiatement informé le Premier-ministre Jean Chrétien que la FOI 2 était impliqué dans la capture de prisonniers en Afghanistan.
Engagement au Kosovo
Scott Taylor, éditeur du magazine Esprit de Corps, a déclaré que la FOI 2 est aussi performante que la Force Delta américaine et le SAS britannique. Certains observateurs estiment que la FOI 2 a été déployée pendant un certain temps au Kosovo, afin de découvrir des objectifs importants et d'utiliser des pointeurs laser pour guider des bombes intelligentes.
Lorsque le député conservateur David Price a déclaré à la Chambre des Communes que la FOI 2 était au sol durant la campagne du Kosovo, le gouvernement a vivement nié pareil engagement – mais il s'agit d'une réponse gouvernementale obligatoire pour toute opération clandestine, et une autre réponse aurait pu mettre en danger la vie des opérateurs. La FOI 2 a presque certainement été déployée dans la ville de Québec, en avril 2001, comme réserve durant les violentes protestations qui ont accompagné le Sommet des Amériques.
Quant à son action en Afghanistan, Scott Taylor affirme que "c'est exactement un rôle pour eux. Ces gars en veulent. Ils sont prêts à mener des opérations spéciales clandestines. Ils sont prêts à risquer leur vie sur le terrain. Chacun de ces gars s'est engagé dans ce but."
David Rudd, de l'Institut canadien des études stratégiques, a déclaré à CBC News que les soldats de la FOI 2 ne s'entraînent pas à prendre une portion de terrain et à la tenir. "Ce qu'ils font, c'est s'infiltrer derrière les lignes ennemies, rechercher des objectifs-clés et les détruire. Ils ne sortent pas pour arrêter des gens ou distribuer de la nourriture. Ils sortent pour abattre des cibles."
Texte original: Martin O'Malley, "JTF2: Canada's super-secret commandos", CBC News Online, 8.1.03
Traduction et réécriture: Cap Ludovic Monnerat