Friedrich Wilhelm von Mellenthin, Panzer Battles,
Ballantine Books, 1985
21 décembre 2003
a
manœuvre mécanisée aéroterrestre a atteint un haut degré d'efficacité durant la
Seconde guerre mondiale, et elle a largement déterminé l'équilibre militaire
est-ouest pendant toute la guerre froide. Ce livre en décrit les mécanismes et
l'application dans la Wehrmacht, en Europe orientale et occidentale, ainsi
qu'en Afrique du Nord.
Le général
Friedrich Wilhelm von Mellenthin a été l'un des meilleurs témoins de l'emploi
de l'arme blindée entre 1939 et 1945. Officier de cavalerie puis d'état-major
général, il a servi en Pologne dans un état-major de corps d'armée, en France
dans une division, dans les Balkans au niveau armée avant de faire partie de
l'Afrika Korps de Rommel. Il a par la suite été chef d'état-major au niveau
corps d'armée, armée et groupe d'armées essentiellement sur le front oriental,
mais également en Europe occidentale pendant plusieurs mois.
Ce livre de 458 pages - au format poche - publié pour la première fois en 1956 représente ainsi un témoignage de première main
sur le déroulement des campagnes cruciales de la Seconde guerre mondiale. En 23
chapitres écrits de manière précise et objective, l'auteur fournit non
seulement une bonne vue d'ensemble des combats mécanisés menés en Europe et en
Afrique du Nord, mais également des descriptions très détaillées - et
s'appuyant parfois sur les récits des commandants impliqués - d'actions
offensives et défensives au niveau brigade, division et corps d'armée.
Sans avoir
commandé lui-même une Grande Unité, von Mellenthin a été placé au cœur de
situations tellement épiques et difficiles qu'il en a tiré une expérience
considérable sur le maniement de l'arme blindée au niveau tactique et le combat
interarmes. De ce fait, ce livre va largement au-delà du récit palpitant et
fournit également des analyses de première qualité pour expliquer la
supériorité d'un camp, les faiblesses d'un dispositif et les avantages d'une
manœuvre particulière.
Ce n'est donc
pas un hasard si Panzer Battles est devenu un classique de la littérature
militaire, et une lecture recommandée outre-Atlantique - au point qu'un
exemplaire ait accompagné le général Schwarzkopf dans le Golfe. Cet ouvrage
montre clairement la supériorité du mouvement sur l'engagement statique, de la
qualité sur la masse, et de la rapidité décisionnelle sur la concentration des
moyens. L'explication du mécanisme nécessaire en cas de retraite a par exemple
une valeur didactique remarquable.
Par ailleurs,
l'auteur met judicieusement à profit son expérience pour montrer le fonctionnement
des états-majors de niveau opératif au sein de la Wehrmacht. L'examen d'une
tranche de 24 heures du commandement de l'armée blindée Afrika, à l'époque de
la prise de Tobrouk, permet ainsi de mesurer les problèmes liés aux liaisons
télématiques et à la synchronisation des connaissances entre les commandants et
les différents états-majors. L'importance de l'exploration électronique est
également mise en évidence.
La principale
faiblesse de ce livre, outre des cartes assez peu lisibles en format de poche,
réside cependant dans le fait que la dimension temporelle n'est pas
suffisamment traitée. Si le délai exact imparti pour la planification d'actions
délibérées ou pour la réaction à des actions adverses avait été
systématiquement mentionné, Panzer Battles aurait pu constituer une
étude absolument exceptionnelle du commandement au sein de la Wehrmacht, et
notamment des Grandes Unités mécanisées.
En revanche,
von Mellenthin a parfaitement inscrit son récit dans le contexte stratégique de
la Seconde guerre mondiale, et ses aperçus à ce sujet sont des plus
instructifs. Ainsi, il montre de manière convaincante que la Russie était fin
1943 à la limite de ses ressources humaines, et que les pertes engendrées par
ses tactiques privilégiant la masse à tout prix l'obligeaient à enrôler des
adolescents pour rétablir les effectifs des unités anéanties. Une réflexion
qui, lorsqu'elle a été écrite, s'adressait de toute évidence à la jeune OTAN.
Au final, ce
livre mérite sa réputation de classique en matière de manœuvre mécanisée, et sa
lecture est recommandée.
Maj EMG Ludovic Monnerat