L'essentiel de l'actualité militaire







L'essentiel des liens militaires


Documents militaires


Toutes les dates des ER


Cliquez ici pour soutenir CheckPoint!


Toutes les unités actuellement en action


Le Swiss Army Theme pour Windows 95


Webring Armée suisse

L'assaut de Moscou est une victoire pyrrhique pour l'avenir de la civilisation

9 novembre 2002

Forces spéciales russes après l'assaut, Moscou, 26.10.02L

'Occident est aujourd'hui engagé dans une guerre avec l'extrémisme islamique qui ressemble à la lutte que toutes les grandes civilisations ont dû mener pour survivre. Mais est-il possible de gagner cette guerre en sauvegardant ses valeurs ? L'éditorialiste Yulia Latynina du Moscow Times pense que telle est la question essentielle. Traduit de l'anglais.

Le Président Vladimir Poutine a tenu parole et buté les terroristes. Non dans les chiottes comme promis, certes, mais dans la fosse d'orchestre. L'Occident a exprimé son soutien. La raison de ce soutien, c'est que l'Occident a découvert avec surprise qu'il menait une troisième guerre mondiale contre l'extrémisme islamique. Et que dans ce conflit, comme durant la Deuxième guerre mondiale, la sauvage et barbare Russie se transforme en alliée.


«...La question n'est pas de savoir si l'Occident va gagner la guerre ou non. La question est de savoir s'il sera toujours l'Occident lorsqu'il le fera. »


Au tournant du XIXe siècle, le monde civilisé vivait dans un état de sécurité métaphysique. Les gens naviguaient sur des navires à vapeur et écrivaient des opéras, et quelque part à la périphérie se trouvaient des Indiens sauvages et des Noirs nus. Il aurait été impossible d'imaginer que des terroristes noirs du Congo s'emparent du Titanic, ou que des bandits tchétchènes, que le vaillant Alexeï Yermolov combattait au fin fond du Caucase, feraient irruption dans un bal de St-Pétersbourg et crieraient "haut les mains" à des dames en tournure.

Pendant des millénaires, le scénario était toutefois entièrement différent. Les civilisations majeures étaient encerclées par des nations barbares et finirent par succomber à leurs assauts – l'Egypte avec les Hyksos, Rome avec les Visigoths et l'empire Han avec les Hsiung-nu. Alaric, le chef des Visigoths qui mit Rome à sac en 410, offrit la meilleure explication à la raison pour laquelle les civilisations majeures deviennent les proies des barbares : "Il n'est pas juste que les choyés et les couards portent de beaux habits et mangent des plats savoureux, pendant que les braves et les fiers n'ont nulle part où poser leurs têtes."

Un anti-cyclone d'audacieux maraudeurs, emplis d'une envie puérile pour les possessions d'autrui, se forme autour de chaque civilisation. L'homme d'Etat persan Rashid ad-Din, auteur au XIIIe siècle d'une histoire universelle, écrivit au sujet des Mongols : "Parmi leur butin, ils trouvèrent un berceau en argent ainsi qu'un couvre-lit tissé d'or, et comme de tels objets de luxe étaient rares à l'époque chez les Mongols, l'événement fut considéré comme important et devient assez bien connu."

Pendant des millénaires, les civilisations ont péri sous la pression de ceux qui admiraient les berceaux et les couvre-lits, et ceci ne s'acheva qu'avec l'invention des armes à feu. Une culture hautement développée survint, pour rechercher non pas le luxe, mais la puissance technologique. A la fin du XXe siècle, la boucle était bouclée. L'infrastructure de la société post-industrielle a atteint un tel niveau de complexité qu'elle est devenue une arme en soi. La Troisième guerre mondiale n'est pas disputée avec des bombes nucléaires, mais avec des avions de transports civils et des salles de théâtre.

C'est une guérilla dans laquelle les extrémistes islamiques utilisent la propre infrastructure du monde civilisé contre lui. Ces guérilleros croient que l'islam devrait assumer une position dominante dans le monde, et que leurs ennemis sont leurs ennemis d'Allah. Mais les vraies convictions des martyrs sont très similaires à celles exprimées par Alaric 16 siècles plus tôt : "Pourquoi ces couards choyés ont tout dans leurs gratte-ciels, alors que nous sommes prêts à mourir et que nous n'avons rien ?"

Il ne s'agit pas ici de critiquer l'islam sans discrimination, mais pour certaines raisons nous n'avons pas vu de terroristes shintoïstes. Les snipers capturés à Washington avaient embrassé l'islam, et pas le bouddhisme. Toutefois, le paradoxe de la Troisième guerre mondiale réside dans le fait que les terroristes ne peuvent pas gagner. S'ils le faisaient, plus personne ne produirait les armes qu'ils utilisent – les avions à réaction et les comédies musicales.

En revanche, la civilisation occidentale – qui dans ce cas comprend la Russie – pourrait perdre. Parce que les deux valeurs fondamentales de la civilisation occidentale sont la démocratie ainsi que le respect pour la vie et les droits de l'individu. En temps de guerre, la société est forcée d'ignorer ces valeurs, comme les forces spéciales russes étaient forcées d'ignorer la possibilité que des otages mourraient par l'usage du gaz.

La question n'est pas de savoir si l'Occident va gagner la guerre ou non. La question est de savoir s'il sera toujours l'Occident lorsqu'il le fera.




Texte original: Yulia Latynina, "Pyrrhic Win for the Future of Civilization ", The Moscow Times, 30.10.02    
Traduction et réécriture: Cap Ludovic Monnerat
    









Haut de page

Première page





© 1998-2002 CheckPoint
Reproduction d'extraits avec mention de la provenance et de l'auteur