La dérive passéiste et isolationniste de l’UDC
est une menace pour la sécurité du pays

31 octobre 2004

Réflexions de fond de l'UDCV

oici deux semaines, l’Union démocratique du centre (UDC) a présenté au pays ses réflexions actuelles au sujet de l’armée et de la politique de sécurité. Résolument tournées vers un passé révolu, ces thèses montrent aujourd’hui que le premier parti gouvernemental n’a pas de réponse adaptée aux conflits contemporains.

La dernière initiative fracassante de l’UDC a suscité une indignation profonde dans les rangs de l’armée, et en particulier des officiers. Intitulé « Pour une armée de milice adaptée à la menace », un document de fond a été présenté le 15 octobre dernier au public dans le but de remettre en question les choix faits depuis 5 ans – avec l’approbation du peuple – en matière de politique de sécurité.


«... Le refus de prendre en considération les réflexions et analyses des officiers qui servent aujourd'hui montre que l'UDC tend à utiliser l'armée comme un thème électoral au lieu d'en faire une priorité stratégique. »


Au vu des réactions suscitées, la direction du parti agrarien n’a pas défendu ce document avec toute l’ardeur qu’on lui connaît généralement, et s’est efforcée de minimiser les contradictions qu’il contient. Il n’en demeure pas moins que ces 16 pages résument la vision du plus grand parti national quant à l’emploi et au fonctionnement de l’armée. Cerner les erreurs et les œillères qui entachent ses thèses constitue dès lors une tâche salvatrice.



Thèse : Non à la coopération internationale qui réduit la sécurité

« La coopération internationale réduit la sécurité. Elle mine la neutralité et expose ainsi la Suisse à un risque accru d'attentats terroristes. La Suisse doit donc éviter de prendre des engagements qui peuvent la mêler à des litiges internationaux. »

L’UDC affirme que la coopération militaire internationale, notamment sous la forme du Partenariat pour la Paix de l’OTAN, n’est qu’une manière de se mettre au service des intérêts américains. Elle explique également la montée en puissance de la guerre asymétrique, en des termes d’ailleurs largement exacts, mais souligne aussitôt que la Suisse doit avant tout se tenir à l’écart des conflits internationaux. Pour les auteurs du document, toute coopération militaire avec les Etats-Unis provoque ainsi un risque accru d’actes terroristes sur notre sol, et ils citent à l’appui l’exemple de l’Espagne.

Bien entendu, l’UDC recycle ici l’un de ces mensonges éculés que répandent les médias aveuglés par la xénophobie anti-américaine, et selon lequel les attentats de Madrid le 11 mars dernier étaient dus à la présence militaire espagnole en Irak. En fait, l’enquête menée après les attentats a montré que la cellule terroriste responsable a pris en octobre 2000 la décision de frapper l’Espagne sur son sol, et que la planification de détail a commencé en septembre 2001. D’ailleurs, les arrestations effectuées ces derniers jours ont prouvé que les terroristes islamistes tentent toujours d’attaquer l’Espagne, même après le retrait des troupes d’Irak. Faire exploser un Palais de justice avec 500 kg de dynamite peut difficilement être interprété comme un signe pacifique.

En fait, l’UDC n’a pas compris – ou admis – que les conflits de notre époque sont avant tout transnationaux, et non internationaux : ses protagonistes principaux tendent à être des acteurs non étatiques qui se jouent des frontières et opèrent sur une échelle globale. Le fait que le cerveau présumé de la cellule islamiste espagnole ait été arrêté en Suisse réduit à néant l’argumentation de l’UDC et souligne son détachement de la réalité. La lutte contre le terrorisme fondamentaliste est par définition à la fois civile et militaire ; même si la Suisse renonce à une coopération militaire explicitement dirigée contre cette menace, elle est tenue de pratiquer l’entraide judiciaire régulière entre Etats, en vertu des nombreux accords signés à ce sujet. Et comme celle-ci suffit à nous ranger dans le camp des Etats occidentaux, force est d’admettre que nous ne sommes pas neutres – ainsi que le Conseil fédéral l’a d’ailleurs souligné.

Pour être logique avec elle-même, l’UDC devrait donc revendiquer le renoncement à toute coopération sécuritaire avec les autres Etats. Je ne suis pas certain que se transformer en Etat-voyou soit une option crédible.



Thèse : Oui à la neutralité armée

« La neutralité est et doit rester la principale maxime de la politique de sécurité et de la politique extérieure de la Suisse. Elle est à la base de la démocratie directe, de la stabilité et de la sécurité. En adoptant une position rigoureusement neutre, la Suisse évite d'être mêlée à des conflits et de devenir la cible d'attentats terroristes. A une époque marquée par la guerre asymétrique, un petit Etat comme la Suisse doit plus que jamais pratiquer une stricte politique de neutralité. »

Pour l’UDC, la neutralité constitue donc une réponse politique à la guerre asymétrique, même si elle ne s’applique qu’aux conflits interétatiques. A lire son document, il suffirait de brandir en permanence notre volonté d’être neutres, d’éviter tout engagement international à l’étranger et d’imposer à l’armée des tâches strictement défensives pour préserver le pays de toute attaque terroriste. Il conviendrait en particulier d’éviter toute coopération avec des armées remplissant des missions de projection, alors même que l’OTAN et l’Union Européenne augmentent justement leurs capacités dans ce domaine.

Cette argumentation visant à idéaliser les vertus de la neutralité armée fait naturellement l’impasse sur la coopération internationale qui s’effectue sur notre propre sol. L’existence d’intérêts étrangers sur le territoire suisse et d’institutions globales majeures associe automatiquement notre pays aux luttes que connaît aujourd’hui la planète, ne serait-ce que par la protection que la Confédération doit accorder à l’intérieur de ses frontières. Encore une fois, l’époque où les Etats étaient les acteurs principaux des conflits armés est bel et bien révolue, et la Suisse subit des dépendances accrues sur le plan politique, économique et éthique qui l’empêchent de choisir une stratégie totalement opposée à celle des Etats qui l’entourent.

L’UDC fait ainsi totalement l’impasse sur les pressions qu’exerce régulièrement l’Union européenne à l’endroit du Conseil fédéral et du Parlement. Les relations amicales que nous entretenons avec la France, l’Allemagne ou l’Italie ne contredisent pas le besoin pour chaque Etat de défendre ses intérêts, même s’ils sont contraires aux nôtres. Les négociations sur les taxes à l’exportation menées à Bruxelles et le différend avec Berlin sur les couloirs aériens de Kloten ont montré que l’Union européenne n’hésite pas à utiliser sa puissance pour imposer ses vues. La petite taille de la Suisse n’entrave pas son indépendance ; le fait qu’elle importe par exemple 100% de ses hydrocarbures ou 40% de ses denrées alimentaires, en revanche, y contribue lourdement.

En d’autres termes, la neutralité armée à elle seule est incapable d’assurer l’indépendance du pays et sa capacité à résister aux pressions européennes. Pour être cohérente avec son intention, l’UDC devrait donc exiger l’établissement d’une autarcie totale. En espérant que ce bras d’honneur fait aux Européens ne soit pas en lui-même une cause de conflit.



Thèse : Oui à l'adaptation à la menace actuelle

« Le mandat principal de l'armée est le mandat de défense. L'armée doit garantir la sécurité du pays et de la population. Le mandat de défense doit être conçu comme une réponse à la menace actuelle et notamment à la guerre asymétrique. Il repose avant tout sur une analyse détaillée et sans a priori des risques et de la menace. »

Il faut souligner que l’UDC est la première formation politique à associer la notion de défense et la menace terroriste contemporaine, et à montrer que le rôle de l’armée reste central en matière de sécurité intérieure et extérieure. De la sorte, le parti agrarien met le doigt sur les insuffisances du Rapport sur politique de sécurité 2000 et sur son incapacité à articuler une mission totalement adaptée aux menaces de notre époque. En mentionnant explicitement le terme d’ennemi, ce document va même plus loin que les militaires et brise un tabou issu de ce politiquement correct qui ronge l’acuité intellectuelle de nos dirigeants politiques. Toute démarche consistant à analyser objectivement l’identité, les motivations et les actions potentielles de nos ennemis reste hautement salutaire.

Malheureusement, c’est précisément une démarche que l’UDC n’a pas effectué avant de rédiger son document de fond. Cela lui aurait permis de constater que les ennemis modernes ne peuvent plus être décrits en termes de localisation géographique ou de projet politique, et que la conquête des esprits mue par le fondamentalisme idéologique et le prosélytisme culturel constitue la vraie dimension des conflits contemporains. Si de tout temps les hommes se sont battus pour ce qu’ils ont, pour ce qu’ils sont et pour ce qu’ils pensent, l’essor des technologies de l’information a renforcé l’importance des facteurs immatériels et subjectifs. Avec pour effet de ranger la Suisse dans le camp des nations occidentales, chrétiennes, high tech, blanches et opulentes – ne serait-ce que dans l’esprit de ceux qui haïssent celles-ci.

Ainsi, l’UDC refuse de reconnaître que la sécurité du pays et celle de la population sont devenues deux notions divergentes. Nous ne vivons plus à une époque où les citoyens suisses naissent, grandissent, travaillent et meurent sans avoir une seule fois mis un pied en-dehors du pays, ni même hors du continent. Grâce à la circulation facilitée des personnes, aux échanges économiques mondiaux et au tourisme extracontinental, les Suisses sont de plus en plus nombreux à séjourner et à s’établir dans d’autres pays, en dépit des risques que cela peut impliquer. Or leur protection fait partie de la mission constitutionnelle de l’armée, dans la mesure de ses capacités. Ce n’est donc pas un hasard si elle développe une aptitude à rapatrier les citoyens suisses menacés à l’étranger.

Ces 10 dernières années, au moins 41 Suisses ont péri en raison d’attentats terroristes menés par des groupes islamistes. A partir de combien de morts doit-on se décider à entrer officiellement en guerre ? Voilà une question à laquelle l’UDC devrait répondre pour appréhender la vraie dimension d’une défense modernisée.



Thèse : Oui à l'exécution du mandat de défense conformément à la menace réelle

« L'armée doit être soumise régulièrement à des exercices complexes basés sur des scénarios réalistes et actuels qui doivent évoluer parallèlement au développement de la situation en politique de sécurité. Ces exercices doivent être soigneusement évalués et les résultats doivent servir à former de manière ciblée les différentes formations militaires afin que l'armée puisse remplir son mandat de défense. »

Cette réflexion sur la préparation de l’armée à remplir sa mission de défense est suffisamment pertinente et large pour ne pas être remise en question. En fait, l’UDC exige l’abandon d’un ennemi dit imaginaire – que l’on devine militaire, conventionnel et générique – pour se concentrer sur la nouvelle menace, et recommande un renforcement de la collaboration entre police et armée. L’analyse de vulnérabilité demandée par le parti agrarien relève également du bon sens, même si les services de la Confédération procèdent depuis des années à ce type d’évaluation. Il est tout de même assez piquant de constater qu’un document de fond souffre de connaissances superficielles.

Cependant, la démarche intellectuelle de l’UDC ne correspond pas aux exigences d’une réflexion stratégique digne de ce nom. Mener une analyse de nos vulnérabilités avant de définir l’ennemi susceptible d’en profiter constitue une inversion dangereuse : c’est au contraire le profil d’un ennemi donné qui détermine nos propres vulnérabilités en fonction des forces et faiblesses respectives. Définir les possibilités d’action de deux belligérants opposés sans prendre en compte les causes qui les habitent et les effets qu’ils déploient ne forme pas une analyse crédible. Le vrai défi de la défense réside d’abord dans le développement substantiel de nos services de renseignement, afin de pouvoir précisément détecter, analyser et comprendre suffisamment tôt les menaces qui pèsent sur nous.

Par ailleurs, on peut douter de l’UDC lorsqu’elle demande que l’entraînement de l’armée soit basé sur des scénarios réalistes, actuels et évolutifs. Il faut en effet rappeler que la neutralité est une stratégie politique destinée à prévenir l’implication du pays dans un conflit entre Etats, et non une méthode pour l’emporter : par définition, une attaque de grande ampleur contre la Suisse met aussitôt un terme à la neutralité et ouvre la possibilité d’une alliance pour la durée de la guerre. Autrement dit, le réalisme que réclament les démocrates du centre doit obligatoirement intégrer l’abandon de la neutralité à une partie des scénarios, et amener l’armée à remplir sa mission dans le cadre d’une coalition. Affirmer que la neutralité offre une protection totale alors même que nous ne sommes pas neutres relève au contraire de la tromperie.

Si une cellule terroriste affiliée à Al-Qaïda fait exploser demain une camionnette piégée devant le Ministère public de la Confédération pour protester contre l’arrestation d’islamistes en Suisse, comment devons-nous réagir ? Est-ce qu’il faut déployer des éléments de combat dans les montagnes afghanes, comme l’ont fait plusieurs pays « neutres » européens ? Voilà d’autres questions auxquelles l’UDC devrait répondre.



Thèse : Oui au système de la milice qui a fait ses preuves

« Le système étatique suisse repose sur le principe de la milice. L'armée suisse est organisée selon les règles de la milice et de l'obligation générale de servir. Si la Suisse néglige le principe de la milice dans le domaine de la défense nationale, l'armée perd son ancrage dans la population. L'armée doit donc revenir au système de la milice. Les statuts de soldat en service long et de soldat contractuel doivent être supprimés. »

En abordant la question du fonctionnement quotidien de l’armée, l’UDC s’avance sur un terrain purement militaire qui de toute évidence la dépasse. Affirmer que le système de la milice n’est pas appliqué, alors même que l’armée compte plus de 95% de militaires non professionnels dans sa composante active, est un mensonge insultant. En fait, l’UDC semble ne pas avoir compris que les soldats en service long, qui effectuent leur service militaire obligatoire en un bloc avant d’intégrer la réserve, sont bel et bien des soldats de milice : écrire que les soldats en service long génèrent des « charges salariales » lorsqu’ils reçoivent la solde et l’APG comme les autres recrues est totalement faux. L’armée avait d’ailleurs demandé un avis de droit durant la réforme Armée XXI pour s’assurer de leur caractère constitutionnel.

Le principe de la milice reste au cœur de l’institution militaire, mais celle-ci ne peut pas ignorer l’évolution de la société et de l’économie, tout comme elle doit remplir les missions changeantes que lui attribuent les dirigeants politiques. La création des soldats en service long avait pour but de répondre à l’augmentation des engagements subsidiaires vécus par l’armée à la fin des années 90 ; c’était également l’une des propositions du rapport Brunner publié à l’été 1998, dans l’idée de rendre plus flexible le service obligatoire et réduire les frictions avec les employeurs au sujet des cours de répétition. Il est clair que la libération plus rapide d’une partie des conscrits réduit l’ancrage dans la population, comme c’est le cas avec toute l’Armée XXI ; mais cette disposition a précisément été l’une des raisons pour lesquelles la population a massivement approuvé cette réforme.

Par ailleurs, les soldats contractuels constituent avant tout une généralisation d’une pratique existant depuis plus d’un siècle : l’engagement rétribué et à durée déterminée de cadres de milice dans l’instruction de la troupe. Le général Guisan lui-même a plusieurs fois servi comme instructeur extraordinaire dans l’artillerie au début du siècle dernier. Aujourd’hui, l’armée compte près de 1000 soldats contractuels, presque tous engagés pour une durée de 5 ans au sein des formations d’application qui rassemblent les écoles. Ils ne doivent pas être confondus avec les militaires engagés pour des missions à l’étranger : la vocation des cadres contractuels n’est pas d’assurer les engagements de l’armée, mais de renforcer l’instruction qui en est le préalable. Cela ne les empêche pas de poursuivre en parallèle leur carrière de milice, et seule une partie d’entre eux aspire à une carrière d’instructeur.

Ce que l’UDC semble ignorer, c’est que le système de milice était à l’agonie sous l’Armée 95, notamment avec l’augmentation vertigineuse des licenciements dans les écoles de recrues. Leur diminution rapide ces derniers mois, et donc la consolidation de l’obligation de servir, doivent être partiellement mises au crédit des soldats contractuels et du service long.



Thèse : Oui à la responsabilité des cadres de milice dans l'instruction

« Les cadres de milice doivent reprendre la pleine responsabilité de l'instruction. Soutenus par des instructeurs de qualité et hautement motivés, les cadres militaires doivent à nouveau garantir une formation réellement professionnelle et répondant aux exigences réelles. »

Sur le thème de l’instruction, les propos de l’UDC sont tout aussi éloignés de la réalité. En affirmant que la formation donnée par les professionnels dans les écoles est un échec, les démocrates du centre tiennent des propos rigoureusement contraires à la réalité : malgré les difficultés que rencontrent les instructeurs du fait de leur nombre insuffisant, et malgré les sureffectifs invraisemblables qui ont entaché la mise en œuvre de la nouvelle armée, l’instruction donnée dans les écoles aboutit à des résultats supérieurs dans presque tous les domaines par rapport aux dernières années. La nouvelle formule du recrutement et de l’instruction de base permet ainsi de fournir un nombre suffisant de volontaires pour l’avancement au sein de nombreuses écoles. Le succès de l’instruction professionnelle est spectaculaire.

Les démissions en hausse dans le corps des instructeurs ne sont d’ailleurs que partiellement liées à la surcharge de travail : le manque de reconnaissance fréquent au sein de l’institution, la diminution substantielle des avantages pécuniaires et la défavorisation même ponctuelle vis-à-vis des cadres de milice sur le plan de l’avancement contribuent lourdement à ce phénomène. C’est donc la preuve de leur qualité remarquable que la plupart d’entre eux s’investissent pleinement et réussissent à donner une instruction efficace. Au demeurant, il faut noter que les cadres de milice conservent la responsabilité de l’instruction axée sur l’engagement en cas de mise sur pied de l’armée, et qu’ils sont engagés dans les écoles à partir de l’instruction en formation du niveau groupe au niveau bataillon. Les propos de l’UDC sont donc trompeurs.

Ils le sont d’autant plus que l’instruction donnée par les cadres de milice a montré ses faiblesses sous l’Armée 95, et que la démotivation en est souvent la conséquence. Le principe des apprentis qui enseignent à d’autres apprentis a été condamné par l’évolution technologique et par la complexité des matières à instruire. Les missions que doivent aujourd’hui remplir les soldats dans les conflits de haute et basse intensité sont compatibles avec une armée de conscription, du moins dans un pays à haut niveau de formation comme le nôtre ; mais leur enseignement exige un système rôdé et des contenus adaptés en permanence, ce que seul un encadrement professionnel peut garantir. Les militaires suisses déployés à l’étranger n’ont rien à envier à leurs homologues d’autres armées, mais l’instruction qu’ils ont reçue l’explique largement.

De nos jours, les cadres de milice issus de l’Armée 95 consacrent l’essentiel de leurs services à apprendre et à maîtriser les innovations découlant de l’Armée XXI, comme la motorisation de toute l’infanterie, la maîtrise de la proportionnalité ou les nouveaux processus de commandement. Que l’UDC les estime capables de fournir une instruction professionnelle montre sa méconnaissance de la réalité militaire.



Conclusion : une dérive menaçante

Les réflexions de l’UDC contiennent d’autres éléments non mentionnés dans les 6 thèses énumérées ci-dessus. Mais elles profèrent également des accusations gratuites et infondées à l’endroit des militaires, comme celle de vouloir la fin du système de milice, de se focaliser sur les engagements à l’étranger, ou plus généralement de négliger leur devoir de protéger le pays. Conjuguées aux erreurs d’analyse grossières qui parsèment ce document, ces accusations expliquent pourquoi ce dernier a été si mal reçu dans les rangs de l’armée. On y retrouve d’ailleurs une rancune mal dissimulée au sujet de la votation populaire du mai 2003, par laquelle le peuple a balayé sans rémission nombre d’arguments aujourd’hui réchauffés – comme la suppression des troupes traditionnelles ou le risque d’une armée à deux classes.

Au risque de paraître méprisant, il convient tout de même de s’étonner que ces thèses soient pour l’essentiel celles d’un divisionnaire en retraite de 82 ans, Hans Bachofner, qui a mené sans succès la charge contre la nouvelle armée. Ce refus de prendre en considération les réflexions et analyses des officiers qui servent aujourd’hui montre hélas que l’UDC, à l’instar du Parti socialiste, tend à utiliser l’armée comme un thème électoral au lieu d’en faire une priorité stratégique. Une démarche obtuse et aveugle qui, à mon sens, constitue en soi une menace pour la sécurité du pays.



Lt col EMG Ludovic Monnerat  








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