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Avec l'introduction de la SE-235, la révolution des transmissions prend forme

23 octobre 1999


Emetteur-récepteur SE-235

Acquises dans le cadre du programme d'armement 1996 pour 490 millions de francs, conçues par Thomson-CSF et produites en Suisse par Ascom, les stations radios SE-235 ont été introduites à la troupe dès l'été 1998.

Il a toutefois fallu attendre l'été 1999 pour que les premiers corps de troupe soient complètement instruits et équipés, et puissent tester le système au niveau bataillonnaire. Et ainsi mesurer l'ampleur de la révolution que les radios PR4G impliquent.


Un système complet et ouvert

La SE-235, rappelons, est une station radio numérique, à cryptage intégré, capable d'établir des communications protégées ou partiellement protégées avec des stations entièrement compatibles comme la SE-135, mais aussi de communiquer en mode analogique avec les SE-227/412. Remplaçant celles-ci, la SE-235 s'accompagne d'un ensemble complet d'accessoires nouveaux: télécommande, antenne fouet, téléantennes et fill guns notamment. Acheté depuis 1991 par 10 Forces armées dans le monde dont 3 membres de l'OTAN, le système PR4G assure d'ailleurs une compatibilité réelle ou potentielle avec des formations étrangères.

Cet émetteur-récepteur constitue d'autre part l'un des éléments de la révolution des transmissions que connaît notre armée, avec l'interconnexion des téléphones de campagne 96 et des stations à faisceaux hertziens R-916 dans le réseau intégré de transmissions militaires (RITM). Une révolution qui est déjà d'une ampleur considérable au niveau de la troupe.


Résistance à la guerre électronique

La SE-235 introduit en effet nombre de nouveautés, parmi lesquelles sa remarquable résistance à la guerre électronique. Plusieurs modes de fonctionnement sont disponibles, combinés en un mode mixte (MIX) qui représente le standard. Ce mode a pour fonction de réagir à un éventuel brouillage; lorsque celui-ci est inexistant, les stations échangent leurs données sur une fréquence fixe (mode DFF) propre à chaque réseau. Si le brouillage couvre jusqu'à 20% du spectre des fréquences, les stations passent en mode évasion de fréquence (FHOP), qui permet 300 changements par seconde. Enfin, si le brouillage dépasse ces 20%, les stations optent pour une recherche de fréquence libre (FCS).

Ces réactions automatiques à l'environnement électronique ne sont pas contraignantes pour l'utilisateur: lorsque ce dernier appuie sur son combiné, il entend distinctement les bips émis par la station qui effectue sa recherche, et sait ainsi lorsqu'il peut parler, après une seconde en général; ce qui résout avec élégance l'éternel problème du PPAP - penser, presser, avaler puis parler.


Cryptage à l'aide de fill guns

En mode numérique, toutes les communications sont cryptées par un codage complexe, inviolable à moins de disposer d'ordinateurs particulièrement puissants... ou l'appareil qui contient les codes utilisés. Celui-ci, nommé fill gun, a une valeur inversement proportionnelle à sa taille: il tient dans la main, tout en contenant la totalité des codes d'un corps d'armée (ou des écoles). Autant dire qu'il reçoit la classification SECRET, doit être entreposé sous clé, n'est remis que sur signature... et possède une touche d'effacement d'urgence!

Cela dit, le fill gun est un système fiable et pratique: il suffit de l'appliquer sur une station, d'entrer le code du fill gun, le numéro du réseau et celui de l'abonné pour que les codes nécessaires soient introduits et que la station soit opérationnelle. Finies, les pénibles entrées manuelles de clefs dans les SVZ-B!

De fait, une SE-235 sans fill gun est comme un ordinateur sans logiciel: sa participation à un réseau nécessite l'activation d'un abonné reconnu. De plus, le fill gun fournit à une station deux clefs de cryptage pour chaque réseau, en cas par exemple de décodage adverse avéré, alors que chaque station peut recevoir jusqu'à trois canaux simultanément - un changement de canal ne constituant bien entendu qu'une exception.


Emetteur-récepteur SE-135, introduit en principe en 2001

Le fonctionnement des réseaux

Les documents radio sur papier existent toujours: ils comprennent le plan des réseaux. Chaque réseau reçoit un numéro à 5 chiffres, un code d'authentification ainsi qu'un nombre défini d'abonnés, désignés par une lettre et 2 chiffres. L'un des abonnés est le chef du réseau (station NCS) et tous les autres sont ses subordonnés (SUB). Cette hiérarchie n'est pas théorique: à la différence des anciens systèmes analogiques, une station NCS peut à tout instant interrompre les communications des subordonnés et commencer une transmission prioritaire, permettant par là-même à chaque chef de conduire également son réseau.

Le code d'authentification souligne la confidentialité habituelle du document radio. Il s'agit toutefois d'une authentification numérique, introduite sur la station même (ou sa télécommande), à la demande de n'importe quel utilisateur et à l'attention de n'importe quel autre. Signalons par ailleurs que toute station peut passer sans délai de SUB à NCS, par exemple en cas de déconnexion définitive du chef correspondant.


Les stations sur char ou véhicule

Dans les chars de commandement, ceux des chefs ou sur les véhicules radio, le système du plan des réseaux signifie par conséquent qu'une station sera NCS alors que l'autre sera SUB. La commutation se fait toujours à l'aide d'un sélecteur, mais ce dernier comporte 6 positions au lieu des traditionnels ALL, A, B, C et INT. En principe, la position 1 permet d'écouter les deux réseaux mais de transmettre sur la NCS, alors que la position 2 relie l'utilisateur à la seule station SUB. Le réflexe de tourner un bouton pour parler à son supérieur ne change donc pas.

Les stations embarquées fonctionnent avec une puissance de 50 W, dix fois plus que les 5 W des stations portables. Elles bénéficient naturellement des antennes du véhicule, même si celles-ci, différentes des anciennes, font perdre près de 50% de la puissance du signal lorsqu'elles sont haubanées; si bien qu'un véhicule à l'arrêt doit aussitôt les relever. Les distances d'engagement standard restent néanmoins suffisantes: pour l'infanterie mécanisée, par exemple, 6 km pour un c sct débarqué à ses chars, 10 km pour le même c sct au char à l'arrêt de son cdt cp (avec téléantenne), 11 km pour le cdt cp au cdt bat dans le mouvement et 24 km entre les deux mêmes à l'arrêt (également avec téléantenne).


Du nouveau dans les DP radio

Les degrés de préparation émission-réception (DP SE) sont toujours au nombre de trois - exploitation SE déclenchée, exploitation SE enclenchée, RX degré à la réception - mais leur importance présente de sensibles différences. Le premier, l'exploitation SE déclenchée, correspond à l'ancienne interruption radio: les appareils sont éteints et les antennes démontées. Ce mode, jadis habituel pour un secteur d'attente, ne constitue à présent plus qu'une exception: les SE-235 doivent en effet en permanence rester allumées pour que la synchronisation automatique du réseau puisse s'effectuer.

L'exploitation SE enclenchée, autrefois station prête au trafic, est donc à présent la règle, y compris dans le secteur d'attente. Le degré RX à la réception reste toutefois utilisable dans un tel contexte, puisqu'il s'agit d'un silence radio automatique, les stations ne pouvant purement et simplement pas émettre.


Règles de trafic: appel sélectif et alarmes

Consécutivement à l'introduction des SE-235, mais aussi celles des SE-135 et SE-138, les règles de trafic radio et téléphone ont été modifiées. Elle tiennent d'une part compte des nouvelles possibilités offertes par le système PR4G. Parmi celles-ci, on notera l'appel sélectif, par lequel deux stations se coupent du reste du réseau et communiquent uniquement entre elles, ou encore la transmission d'alarme: les SE-235 possèdent en effet 10 alarmes différentes, désignées par un chiffre, prédéfinies (alarmes A, C, chars ou héli) ou définies par l'ordre d'engagement; déclenchées par trois pressions de touches, ces alarmes sont transmises à la totalité des stations subordonnées en passant sur tous les réseaux.

Lorsqu'un commandant de bat fus méc déclenche par exemple une alarme sur sa station NCS, les 135 autres stations PR4G du bat émettent alors instantanément un signal sonore qui retentit tant qu'une touche n'est pas pressée, avec indication du numéro de l'alarme sur l'affichage de la station. Un moyen de conduite pour le moins unique.


Disparition des indicatifs radio

Mais les règles de trafic communes ont également été modifiées. Le cryptage numérique rend ainsi caduque l'utilisation d'indicatifs radios, à l'exception de certains cas précis. Une communication standard prend de ce fait la forme suivante: "A chef de sct 1 de commandant de compagnie, contrôle de liaison, répondez / Chef sct 1 compris, DUE répondez / Compris TRE, terminé." On notera que l'annonce de l'audibilité reste obligatoire, même si chaque station affiche la puissance du signal de réception, et que les chiffres en italien sont encore utilisés.

En effet, la tabelle d'épellation helvétique passe aux oubliettes: interopérabilité oblige, les idiosyncrasies nationales n'ont plus aucun sens et c'est la tabelle d'épellation internationale qui est désormais employée. Anna, Bertha, Carlo et les autres cèdent la place à Alfa, Bravo et Charlie, alors que les uno, due e tre deviennent one, two and three.


Un système efficace mais exigeant

Tout en bouleversant certaines habitudes, la SE-235 apporte donc un ensemble de possibilités nouvelles et une efficacité globale largement supérieure. Le remplacement de stations datant du Vietnam relevait il est vrai de l'urgence. Après une vingtaine d'heures d'instruction et d'exercices dans le terrain, y compris en milieu urbain, il m'apparaît toutefois que cette efficacité est liée à des exigences supérieures en matière de transmissions.

Le propre du numérique, en effet, est de ne pas supporter la détérioration du signal: alors que celle-ci impliquait une baisse de la qualité auditive de la liaison analogique, elle entraîne tout simplement une interruption de la liaison sur SE-235, puisque la synchronisation n'est plus assurée. Maintenir la liaison doit donc devenir une quasi-obsession pour le personnel spécialiste comme pour les chefs, puisque ce sont ces derniers qui conduisent leur réseau. Cette discipline est d'ailleurs tout aussi nécessaire pour la gestion des fill guns, dont des effacements d'urgence par inadvertance ont des conséquences très négatives.

Mais la responsabilisation n'est-elle pas le propre d'une armée qui se dirige à grands pas vers le high-tech?


Plt Ludovic Monnerat    






Sources

Aide-mémoire 58.780, Système radio SE-235, Edition d'essai du 20.02.1999; règlement du Chef des forces terrestres sur les Règles de trafic radio et téléphone, édition d'essai entrée en vigueur le 1.7.1999; documentation Thomson-CSF Radios


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