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Cuba 1962 : ce fut presque la guerre nucléaire

29 mai 2001


Site de missiles à Cuba, 1962L

a crise des missiles de Cuba – l'instant ou le monde fut le plus prêt d'une guerre nucléaire généralisée – s'est déroulée en 1962, mais il semble que c'est une histoire qui mérite toujours d'être racontée.

La semaine dernière un groupe de vétérans, d'anciens protagonistes de la Crise, se sont rencontrés à Moscou pour une projection spéciale du film "13 jours" avec Kevin Costner et traitant de l'événement. Ce groupe comprenait l'ancien Secrétaire à la Défense Robert McNamara et Theodore Sorensen, l'ancien conseiller politique de John F. Kennedy, ainsi que plusieurs anciens chefs politiques et militaires soviétiques.

«... Ils pensaient que si l'invasion de l'île de Cuba provoquait une guerre mondiale, cela permettrait de détruire la menace soviétique une fois pour toutes. »
«... Ils pensaient que si l'invasion de l'île de Cuba provoquait une guerre mondiale, cela permettrait de détruire la menace soviétique une fois pour toutes. »

Les vétérans russes ont vraiment apprécié ce film, malgré les inévitables approximations d'Hollywood, telle la scène d'une base de missiles à Cuba où le pompage du combustible liquide dans les fusées se fait avec des centaines d'hommes et des véhicules circulant en tous sens de manière erratique, à l'image de la cohue du week-end sur un marché de légumes dans le Moscou d'aujourd'hui, ou encore la destruction d'un avion espion U-2 par un coup direct dans l'aile alors qu'en fait les charges explosives des missiles SAM russes étaient réglées pour exploser à plusieurs dizaines de mètres de la cible.

Le film illustre aussi un U-2 qui, pour éviter les SAM, effectue des manœuvres évasives alors que cet avion particulier volant à haute altitude et à vitesse très réduite en était incapable. Et ainsi de suite, et ainsi de suite…Pour les vétérans soviétiques, ce film a fait renaître le monde de leur jeunesse et de la Russie comme superpuissance véritablement crainte de tous.

Mais le drame principal qu'il décrit n'est pas entre l'Ouest et l'Est. La bataille se livre entre la Maison Blanche et les Faucons du Pentagone. Ils croyaient que Kennedy était trop faible et ils le poussaient à bombarder Cuba, à envahir l'île et à détruire le régime de Fidel Castro et les bases soviétiques. Ils pensaient que si l'invasion de l'île de Cuba provoquait une guerre mondiale, et bien ce ne serait pas si grave étant donné que cela permettrait de détruire la menace soviétique une fois pour toutes.

Lockheed U-2

McNamara affirma suite au film qu'"à cette époque nous ne connaissions pas la présence de d'armes nucléaires tactiques à Cuba. La CIA ne savait pas qu'il y avait des armes et des missiles nucléaires opérationnels sur l'île."

Sorensen demanda à l'auditoire: "Que ce serait-il passé si Kennedy avait retenu le mauvais conseil de son Chef d'Etat-major interarmées et son ancien secrétaire d'État Dean Acheson et avait décidé d'attaquer Cuba ? Les Soviétiques auraient pu utiliser leurs missiles avant qu'ils ne soient détruits et nous ne serions pas là aujourd'hui".

Les vétérans russes en firent une description quelque peu différente.

«... En fait, notre commandement suprême était en train de planifier notre dissimulation dans les montagnes cubaines et, peut-être, de lancer quelques opérations de guérilla. »
«... En fait, notre commandement suprême était en train de planifier notre dissimulation dans les montagnes cubaines et, peut-être, de lancer quelques opérations de guérilla. »

Le Général Mikhail Titov (chef de la division opérationnelle de l'état-major de commandement des forces armées russes de Cuba en 1962) me raconta : "Kennedy nous a sauvé la vie. Notre commandement à Cuba n'avait pas autorité pour utiliser des engins nucléaires même si les Américains avaient attaqué. Lorsque la crise des missiles s'est développée le Kremlin a même supprimé le droit d'utiliser des armes nucléaires tactiques. Si nous avions été attaqués, nous aurions commencé par appeler Moscou. Le temps que des instructions concrètes nous soient transmises, si tant est qu'il y en ait eues, l'offensive aérienne aurait anéanti tous nos missiles."

"Je suis sûr que nous n'aurions même pas réussi à frapper les États-Unis avec une seule arme nucléaire. Les forces russes de l'île, fortes de 40'000 hommes, et les 200'000 hommes très mal entraînés de la milice cubaine auraient été décimés par les attaques aériennes. En débarquant, les divisions des Marines et de l'US Army n'auraient rencontré qu'une résistance symbolique. Nous aurions été anéantis, et nous le savions. En fait, notre commandement suprême était en train de planifier notre dissimulation dans les montagnes cubaines et, peut-être, de lancer quelques opérations de guérilla."

Il semble que le Chef d'Etat-major interarmées et Acheson avaient raison dans une certaine mesure. En 1962, les Etats-Unis auraient pu envahir Cuba avec succès. Ils auraient même pu gagner une guerre nucléaire généralisée : l'ennemi aurait été détruit par des milliers d'armes nucléaires , alors que les Soviétiques auraient difficilement pu frapper les USA avec 10 ou 20 armes. Durant les années 70 et 80, cette possibilité disparut : la Russie avait beaucoup trop de têtes nucléaires et de systèmes pour les lancer.

Mais bien sûr, aujourd'hui, le monde est de fait dominé par les Etats-Unis. Kennedy et McNamara sont justifiés, leur approche "douce" était la bonne. Et pour finir l'Union Soviétique s'est écroulée sans une seule bataille.

En 1962, j'étais terrifié car j'écoutais la couverture des événements par le service mondiale de la BBC. Mais la plupart des Russes ne l'était pas, la machine de propagande soviétique veillait à minimiser la crise. C'est un miracle si les dirigeants du Kremlin ne se détruisirent pas eux-mêmes et la Russie avec, mais ils le firent plus tard.

Le Kremlin qui gouverne ses sujets à l'aide d'une propagande d'État vicieuse est le pire ennemi de la Russie. Il a déjà conduit le pays à la faillite, et il semble aujourd'hui qu'il se prépare à en faire autant.




Texte original: Pavel Felgenhauer, "It Was Almost Nuclear War", The Moscow Times, 19.4.01    
Traduction: Plt Christophe Beney
    





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