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Armée onusienne et puissances régionales,
ou comment prendre en charge le fardeau de la paix

14 mars 2004

'Haiti, arrivée des soldats français du 33e RIMA, 1.3.04C

omment éviter de sauter d’une crise à l’autre et mettre en œuvre une stratégie capable d’empêcher les États du Tiers-Monde de s’effondrer ? L’analyse américain Max Boot, spécialisé dans les conflits de basse intensité, préconise la création d’une armée onusienne permanente et l’action des puissances régionales.

Cette année, c’est Haïti. L’année dernière, c’était le Libéria. Auparavant, c’était la Sierre Leone, le Congo, le Rwanda et la Somalie. Le monde est plein d’États échoués où la vie est malsaine, brutale et courte. Les nations puissantes savent qu’elles ne peuvent pas ignorer ces zones, non seulement pour des raisons morales, mais parce que les problèmes se répandent dans leurs propres arrières-cours par le biais de maladies contagieuses, de réfugiés et – au pire – de terroristes et d’armes de destruction massives. Mais que sont-elles censées faire avec ces catastrophes humanitaires ?


«... L'ONU a besoin d'une force professionnelle et coriace comme la Légion étrangère française, une force qui ne fléchirait pas face à des chefs de gangs haïtiens ou des purificateurs ethniques serbes. »


Un siècle plus tôt, la réponse allait de soi : un pays « civilisé » colonisait un pays « non civilisé ». Aujourd'hui, il y a peu d'enthousiasme en Occident pour empoigner ce que Rudyard Kipling appelait « le fardeau de l'homme blanc. » Donc, au lieu d'agir de manière décisive, nous nous débrouillons tant bien que mal, nous passons des résolutions pleines de noblesse aux Nations-Unies, et nous envoyons occasionnellement quelques soldats. C'est cette approche hésitante qui a autorisé le génocide au Rwanda, le massacre en Bosnie et des horreurs moindres du Libéria à Haïti.

N'est-il pas temps de faire sérieusement face à la question des États échoués ? Si nous le faisons, il s'agit de trouver des remèdes au niveau national et international.



Vers une armée onusienne permanente

Sur le plan national, les Etats-Unis ont besoin de créer une agence permanente dévolue à la construction de nation ; son directeur devrait avoir l’autorité de contraindre plusieurs départements du gouverment américain à travailler ensemble, quelque chose qui ne s’est pas produit lors de l’invasion de l’Irak. Les militaires doivent également accorder davantage d’attention à la construction de nation, peut-être en adoptant une proposition émise par le Bureau de la Transformation des Forces du Pentagone en vue d’ajouter quelques divisions spécialement entraînées pour le maintien de la paix.

Toutefois, la tâche de policer la planète est trop vaste pour un pays, et les Etats-Unis nécessitent davantage d’aide de leurs alliés. Washington devrait encourager les puissances régionales à assurer la responsabilité de leur propre arrière-cour – l’Australie en Asie du Sud-Est, le Nigéria en Afrique de l’Ouest, l’Afrique du Sud en Afrique australe, et ainsi de suite. Cela s’est en partie déjà produit, avec par exemple les interventions australiennes au Timor Oriental et dans les Iles Salomon. Les Etats-Unis ont fourni un appui pour ces missions mais pas de troupes – un bon arrangement de leur point de vue.

Il existe également des organisations internationales qui peuvent les aider. L’OTAN est en train de créer une force de réaction rapide forte de 21'000 soldats. L’Union Européenne veut suivre le mouvement. Et le Pentagone a discuté la formation d’une force internationale de maintien de la paix à partir de contributions provenant des Etats-Unis et de nations alliées, bien que son fonctionnement effectif reste peu clair.

Et n’oublions pas les Nations Unies. Elles déploient actuellement plus de 45'000 gardiens de la paix, mais leur efficacité est sévèrement limitée par le fait qu’ils sont censés faire respecter des accords de paix existants et demeurer strictement neutres même si l’une des parties est clairement fautive. Ce qui n’aide en rien des endroits comme le Rwanda et Haïti, où il n’y a pas de paix à faire respecter. L’idée de créer une force onusienne plus robuste, capable de frapper des agresseurs, est dans l’air depuis la fin des années 40. Elle a brièvement connu un regain d’intérêt au début des années 90, après la fin de la guerre froide, pour être enterrée après les échecs de l’ONU en Bosnie, au Rwanda et en Somalie. Il est temps de ressusciter l’idée d’une armée onusienne permanente, afin de compléter – sinon remplacer – les autres forces mentionnées ci-dessus. La recette pour la faire fonctionner consisterait à renoncer à la vieille méthode de l’ONU, qui consiste à demander des contributions militaires à un grand nombre de pays qui ont des capacités minimales, aucune habitude de travailler ensemble des intérêts stratégiques différents. Et les casques bleus produits de la sorte sont la risée de tous les truands de la planète.

L’ONU a besoin d’une force professionnelle et coriace comme la Légion étrangère française, une force qui ne fléchirait pas face à des chefs de gangs haïtiens ou des purificateurs ethniques serbes. Les membres d’une telle organisation devraient être recrutés sur la base du mérite et s’entraîner ensemble ; ils ne pourraient pas être assemblés à la dernière minute à partir de la racaille militaire envoyée par les dictatures du Tiers-Monde. Pour faire fonctionner cette force, le département onusien des opérations de maintien de la paix devrait renforcer ses capacités de commandement, de renseignement et de logistique. Les Nations Unies auraient également besoin d’améliorer leur aptitude à faire fonctionner des États échoués sous la forme d’une tutelle comme au Kosovo.

Cette proposition peut sembler un désir pris pour une réalité, non seulement parce l’ONU est si lente à changer, mais également parce qu’il y a tant d’animosité envers elle à Washington, qui devrait s’engager pour cette nouvelle force. Si même les Clintonites « multilatéraux » ont renoncé à cette idée, quelles chances y a-t-il pour qu’elle soit adoptée par les Bushistes « unilatéraux » ? Sans doute bien peu, mais le Président Bush avait coutume de s’opposer également à la construction de nation – jusqu’à ce qu’il réalise que cela correspond à l’intérêt des Etats-Unis.

De manière analogue, renforcer les capacités de maintien de la paix est très nettement dans notre intérêt. Cela nous permettrait d’éviter le dilemme que nous affrontons aujourd’hui en Haïti : soit ne rien faire et laisser la violence exploser, ou se charger d’un fardeau – régler les choses nous-mêmes – que nous ne sommes pas prêts à porter. Il doit y avoir une meilleure méthode. J’espère que nous la trouverons avant que n’éclate le prochain désastre.



Texte original: Max Boot, "Shouldering the load for peace", The Washington Times, 29.2.2004  
Traduction et réécriture: Maj EMG Ludovic Monnerat
  









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