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La 101e division aéromobile à l'assaut
dans la ville chiite de Karbala

12 avril 2003


Soldat de la 101eV

aste cité de 350'000 habitants, Karbala a été prise le 7 avril par une brigade aéroportée appuyée par un bataillon de chars. Grâce à une intégration interarmes efficace et à la prudence méthodique des troupes, cette conquête ne s'est faite qu'un prix d'un seul mort américain. Reporter au Washington Post, Rick Atkinson décrit ici l'atmosphère et les événements au PC du brigadier durant la première journée de l'attaque.

La bataille de Karbala a débuté le matin du 5 avril par une demi-douzaine de frappes aériennes avec des bombes JDAM à guidage satellitaire contre les arsenaux des paramilitaires. A 1030, 20 hélicoptères UH-60 Black Hawk et quelques birotors CH-47 Chinooks commencèrent à transporter trois bataillons d'infanterie dans des zones d'atterrissage nommées Sparrow et Robin dans les extrémités sud-ouest et sud de la ville.


«... Il revenait à six bataillons de la 2e brigade de l'arracher à quelque 500 combattants appartenant aux miliciens, aux fedayins et aux loyalistes du parti Ba'as. »


Puis, dans une poussière tourbillonnante et une chaleur étouffante, 28 chars de combat Abrams et 16 véhicules de combat d'infanterie Bradleys foncèrent en rugissant de l'est et du nord-est – un marteau contre l'enclume de l'infanterie. Des batteries d'artillerie tirèrent plus de 100 obus nébulogènes pour masquer les fantassins faisant mouvement dans les rues, et des hélicoptères OH-58 Kiowa volaient à la hauteur des toits pour détruire quatre mortiers irakiens dans une vaste fosse.

"Voilà une belle matinée", déclara le colonel Joseph Anderson, le grand et sérieux commandant de la 2e brigade de la 101e division aéromobile. "Des Kiowas, des Black Hawks, des JDAMs, des mortiers, de la fumée."



L'infanterie prend pied

Karbala, une grande ville chiite située à quelque 100 kilomètres au sud-ouest de Bagdad, avait été contournée la semaine précédente par la 3e division d'infanterie pendant sa poussée sur la capitale irakienne. Il revenait en ce jour à six bataillons de la 2e brigade de l'arracher à quelque 500 combattants appartenant aux miliciens, aux fedayins et aux loyalistes du parti Ba'as.

Placé sur une route noire séparant la décharge de Karbala à 1,6 kilomètre au sud de la ville, le poste de commandement d'Anderson était en vérité incommode. "Ces mouches", soupira le lieutenant-colonel Bill Bennett, le chef artillerie de la brigade. "Nous sommes exactement au milieu d'un remblai."

A 1045, les sections d'infanterie de pointe annoncèrent avoir saisi quelques immeubles au sud-ouest de Karbala, suivies cinq minutes plus tard par un rapport similaire venant du sud-est. Comme la ville était divisée par les officiers d'état-major de la brigade en 30 secteurs, désignés de A à DD, Anderson montra sa carte. "Nous avons pris pied en G, en I, et nous sommes à Charlie Charlie", dit-il.

Rick Atkinson à Karbala, 6.4.03

Quelques instants plus tard, comme la résistance irakienne s'intensifiait, un officier proposa de demander une autre frappe aérienne. Le major-général David H. Petraeus, le commandant de division qui était arrivé pour surveiller la bataille, conseilla la prudence. "Ne le fais pas, Joe", conseilla Petraeus à Anderson. "Nous en avons frappé six. C'est suffisant. Nous avons maintenant des hommes dans la ville."

Plusieurs charrettes tirées par des ânes se traînaient à travers le remblai, chassées par un chien aboyant. A 1105, un ancien colonel de l'armée irakienne travaillant à présent pour l'US Army annonça que ses interrogatoires des habitants révélaient que "la ville était libre".


«... La 2e brigade de la 101e division aéromobile, appuyée par le 2e bataillon du 70e régiment de chars, a achevé la prise de Karbala le lendemain au prix d'un seul mort. »


Ce n'était pas le cas. Soixante secondes plus tard, un pilote de Kiowa annonça par radio qu'il attaquait une ligne de tranchée défensive et des camions transportant des roquettes antichars. L'une d'elles, visant apparemment un hélicoptère, explosa avec une bouffée noire près d'un château d'eau. Juste au sud, un Chinook décolla dans une tornade de poussière brune, crachant des flares jaunes pour écarter tout missile infrarouge.

A 1135, un commandant de Bradley annonça qu'il faisait feu sur un Irakien armé d'un lance-roquettes et positionné sur un toit. "Ils ne sont plus pour longtemps de ce monde, je suppose", dit Petraeus. Quelques instants plus tard, les fantassins avisèrent qu'ils avaient trouvé une dizaine de canons antiaériens S-60 dans un entrepôt près de l'autoroute 9, la première des nombreuses caches d'armes découvertes à Karbala. "Je pense que cela va être un grand jour de chasse", dit Anderson.

A 1140, le crépitement de la mitrailleuse calibre .50 d'un Kiowa parvint de la ville, où un trio d'hélicoptères piquaient et remontaient comme des hirondelles à 110 km/h. Le poste de commandement s'était alors étendu à une douzaine de Humvees, y compris le petit convoi de Petraeus, tous moteurs allumés dans la chaleur abrutissante pour faire fonctionner les radios.



Feu d'appui pour une évacuation

Précisément à midi, un appel radio jeta le calme dans le poste : "Trois blessés, un critique. Nous avons besoin d'une évacuation médicale. D'autres sont au milieu d'un champ de mine dans une fusillade."

"De quoi avez-vous besoin ? D'artillerie ?", répondit Anderson. "Attendez. Nous allons vous aider."

Des colonnes de fumée noire s'élevaient sur le centre et les quartiers orientaux de la ville. Un tube d'artillerie tira un obus 600 mètres au-delà la cible, délibérément, pour éviter de toucher des soldats américains. Un observateur dans la ville donna par radio des instructions pour reculer le feu de l'artillerie vers la cible par incréments de 100 mètres.

Petraeus tira la manche d'Anderson. "Ce que nous devrions faire", suggéra-t-il, "c'est mettre une munition précise sur lui au lieu de déplacer l'artillerie sur toute la ville."

Anderson hocha la tête. "Nous détruirions la ville."

"Fin de la mission de feu, monsieur ?" demanda Bennett, incapable de dissimuler le scepticisme de sa voix.

"Fin de la mission", ordonna Anderson, qui appela ensuite l'unité avec les troupes blessées. "Evacuation médicale en route, 25 minutes. Faites de votre mieux pour stabiliser."

Soldats de la 101e prêts à embarquer dans un Black Hawk

A 1225, Anderson se tourna vers son officier de liaison aérien, ou ALO (air liaison officer), qui était dans un autre Humvee sur un téléphone satellitaire avec un coordinateur des attaques aériennes au quartier-général du Ve Corps. Deux cibles allaient être touchées par de l'appui aérien rapproché, ou CAS (close air support), dont un centre de commandement suspecté du parti Ba'as.

"ALO, on en est où ?"

"On attend les avions, monsieur", répondit l'officier de liaison, un jeune capitaine. "On ignore combien de temps."


«... Un vent du sud brûlant et fort soulevait de la poussière au-dessus de Karbala.
Les lasers détestent la poussière. »


"D'accord. Tenez moi au courant." Des chauffeurs et des soldats d'un détachement de sécurité mangeaient des repas prêts à consommer froids avec des cuillères en plastique. Un officier d'état-major ajusta les quatre pierres fixant sa carte sur le capot d'un Humvee.

A 1235, l'officier de liaison aérien annonça que deux chasseurs-bombardiers F/A-18 était presque au-dessus, en emmenant des missiles Maverick – chacun équipé d'une charge explosive de 136 kg – qui nécessitaient que quelqu'un projette un rayon laser sur la première cible. "Est-ce que l'on peut avoir un Kiowa pour illuminer la cible ? Il a besoin de toucher la partie ouest du bâtiment."

Un officier d'artillerie se glissa vers Anderson. "Nous avons aussi Copperhead si vous le voulez, monsieur" dit-il, en se référant à un obus d'artillerie à guidage laser.

"Aujourd'hui est un jour d'appui aérien rapproché", répondit Anderson. "Ne soyez pas jaloux."

"A quelle altitude sont les hélicoptères ?", appela l'officier de liaison.

"Très bas", répondit Anderson. Un autre officier précisa, "15 mètres".

"Les chasseurs seront prêts dans environ une minute." Puis : "Ils seront là dans 30 secondes". Puis : "Monsieur, deux minutes de retard."



Des missiles devenus stupides

L'officier d'artillerie revint. "Monsieur, nous pouvons essayer le Copperhead sur une autre cible, l'armurerie."

Anderson transmit un rapport du pilote de Kiowa. "Laser allumé."

"Dites lui de le laisser dessus pendant 34 secondes", dit l'officier de liaison. Puis survint une confusion ; le Maverick n'avait pas réussi à détecter le rayon laser et était "devenu stupide." Un vent du sud brûlant et fort soulevait de la poussière au-dessus de Karbala. Les lasers détestent la poussière.

"Je me demande où il va atterrir", murmura un officier. Tout le monde leva la tête.

"Où est-il passé ?" demande Anderson.

Chute de la statue de Saddam Hussein à Karbala, 6.4.03

"Il a éteint le laser et la bombe est devenue stupide", répondit l'officier de liaison. "Le chasseur est en train de revenir."

"Le Kiowa tourne autour d'une cible dangereuse", dit Anderson. "C'est celui qui se fait tirer dessus, pas vos gars."

"Une fois qu'ils ont commencé à illuminer, laissez-le dessus", conseilla l'officier de liaison.

Le Kiowa remonta sur la cible, mais le F/A-18 n'était pas en position ; puis le chasseur arriva, mais le Kiowa s'était esquivé.


«... Quelqu'un annonça une statue de Saddam dans un square. Est-ce que vous voulez que nous l'abattions ? Tuons l'ennemi avant de commencer à penser aux statues. »


"Nous allons adopter un délai de 3 minutes", dit l'officier de liaison, "et il devra illuminer pendant la dernière minute."

Deux minutes plus tard, l'officier de liaison appela, "le laser devrait être dessus."

"Laser sur la cible", transmit Anderson aux Kiowas.

L'officier d'artillerie revint. "Monsieur, nous sommes prêts."

"Monsieur", appela l'officier de liaison, "il ne pense pas que l'arme a été guidée, encore une fois."

Anderson laissa s'échapper un gémissement exaspéré. "Ahhhh".

Une vive explosion résonna quelque part derrière le poste de commandement. Les yeux s'écarquillèrent, les têtes se tournèrent. Plusieurs officiers laissèrent fuser une suite de jurons bien sentis.

"Ok", dit Anderson, "on va régler ça avec les bons vieux 155", se référant aux obus d'artillerie de 155 mm. "On ne va pas s'embêter avec le Copperhead."

Les visages des artilleurs s'éclairèrent, de retour dans le combat. L'officier de liaison aérien s'effondra de découragement.



Une chaude et longue journée

Un pilote de Kiowa donna par radio les coordonnées de 10 chiffres, précises au mètre près, d'une large enceinte où des tireurs irakiens avec des RPG s'alignaient sur les toits. Une batterie de six canons de 155 mm gronda. Une douzaine d'explosions en l'air – déclenchées par radar 6 mètres au-dessus du sol – recouvrit le secteur avec de la fumée et des éclats sur un rayon de 50 mètres. "C'était suffisant pour les secouer", dit Bennett.

La bataille continua durant l'après-midi étouffante. D'autres obus d'artillerie tombèrent à 1325, cette fois plus de 100 explosions en l'air d'obusiers de 105 mm, chacune projetant des centaines d'éclats d'acier sur un rayon de 35 mètres. Les observateurs d'artillerie ont dénombré 35 cadavres irakiens après le tir de barrage.

"On a un bataillon d'infanterie au sol, ici, et des Kiowas qui volent au-dessus d'eux", dit Bennett, "donc c'est un peu limite. Tout le monde doit reste concentré afin d'éviter les tirs fratricides."

Forces spéciales US

Quelqu'un à la radio annonça "une statue de Saddam Hussein dans un square. Est-ce que vous voulez que nous l'abattions ?" Une autre voix répondit, "vous pourriez accidentellement lui rouler dessus." Petraeus s'interposa: "tuons l'ennemi avant de commencer à penser aux statues."

"Continuez à vérifier les écoles", ordonna Anderson par radio à 1425. "C'est là que l'on a trouvé des trucs." D'autres trucs en effet sont trouvés : des obus de mortiers, des roquettes, des munitions. Cinq minutes plus tard, une équipe des forces spéciales arriva dans quatre véhicules, y compris un pick-up équipé d'une mitrailleuse de calibre .50 montée à l'arrière. "Nous ne savions pas que vous alliez attaquer aujourd'hui", dit l'un des soldats des forces spéciales à Petraeus.


«... Une équipe des forces spéciales arriva dans 4 véhicules. Nous ne savions pas que vous alliez attaquer aujourd'hui, dit l'un des soldats au commandant de division. »


Une balle isolée siffla au-dessus du poste de commandement, puis une autre. Un sniper des forces spéciales scannait un bâtiment agricole proche avec un viseur à fort agrandissement.

A 1530, un rapport par radio nota qu'un véhicule de combat Bradley avait été détruit par "des rafales de RPG venant de trois directions."

"C'est une longue, longue et chaude journée pour les hommes", nota Petraeus à 1615. En tout, huit soldats américains étaient blessés, selon le lieutenant-colonel Richard Thomas, le médecin en chef de la 101e division, dont un grièvement blessé par la détonation d'une mine et un autre par une balle. Cinq autres ont été blessés par le crash d'un Black Hawk et deux autres ont souffert d'un coup de chaleur, ajouta Thomas.

A la fin de l'après-midi, Petraeus roula à travers le quartier sud de Karbala, encourageant ses soldats avec un pouce levé et un "hoo-ah". Il appela Anderson avant de retourner au quartier-général de la division, 50 km plus au sud.

"Nous allons prendre de l'eau, manger et avoir un peu de repos", lui répondit Anderson. "Et nous allons y retourner demain."




Texte original: Rick Atkinson, "After First Skirting Karbala, Army Now Aims to Take It", Washington Post, 6.4.03    
Traduction et réécriture: Maj EMG Ludovic Monnerat    



La 2e brigade de la 101e division aéromobile, appuyée par le 2e bataillon du 70e régiment de chars, a achevé la prise de Karbala le lendemain, au prix d'un seul mort. Au moins 100 paramilitaires ont péri dans les combats. La population de la ville a acclamé l'arrivée des soldats américains dans une atmosphère de carnaval.







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