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Les hélicoptères de combat US ont brillé durant l'opération Anaconda

30 mars 2003


Apache AH-64 à Bagram, mars 2002C

onfrontés à une résistance intense lors de l'opération "Anaconda", les hélicoptères de combat Apache ont démontré leur aptitude à encaisser de multiples impacts et à projeter un feu précis et dévastateur. Leur engagement actuel en Irak mérite que l'on s'intéresse de plus près à leur utilisation en Afghanistan.

Il était 0430 le 2 mars 2002, jour J de l'opération "Anaconda", lorsque les pilotes de la 159e brigade d'aviation et du 7e bataillon du 101e régiment d'aviation, appartenant à la 101e division aéromobile, commencèrent leurs vérifications précédant le vol et mirent en route les rotors de leurs hélicoptères transporteurs de troupes CH-47 Chinook. Derrière eux, les fantassins de la 101e aéromobile et de la 10e division de montagne attendaient l'ordre d'embarquer. Ils portaient de la nourriture, de l'eau, des vêtements chauds, des appareils de vision nocturne et des équipements de communication en plus d'armes et de munitions diverses. Certains soldats portaient plus de 45 kg. Un canonnier arrière d'un Chinook, après avoir vérifié sa mitrailleuse M-240 sur affût, sortit et parla au pilote par l'intercom tout en observant les rotors qui commençaient à tourner. Finalement, il retourna à la porte arrière de son hélicoptère et fit signe aux troupes d'avancer.


«... Doté d'un formidable éventail d'armes – canon de 30 mm, missiles Hellfire et roquettes de 70 mm – leur appareil était l'un des 5 Apaches à pénétrer dans la vallée. »


Le capitaine Frank Baldazar de la 101e conduisit ses hommes à bord des hélicoptères. Par-dessus le bruit de l'appareil, un sergent hurlait, "Allez-y, allez-y, montez. Arrêtez de porter ces merdes – asseyez-vous dessus, faites de la place, allez-y !" Les hommes s'alignèrent à bord des engins. Au total, huit Chinooks en deux séries de quatre se préparèrent à partir pour la vallée de Shah-i-Kot. Un halo de lumière commençait à se former sur l'extrémité des rotors, alors que la vitesse des pales s'accélérait. Les CH-47 finirent par décoller et s'enfoncer dans le ciel nocturne, visibles par instants grâce aux parasites sur les pales mais disparaissant en atteignant leur vitesse de croisière.



Vers la vallée de Shah-i-Kot

Le colonel Frank Wiercinski, dont l'indicatif radio était "RAK 6", et le reste du poste de commandement tactique de la brigade, surveillait l'horizon à bord de deux UH-60 Black Hawk au-dessus du secteur de l'objectif. Il savait que l'opération serait la plus vulnérable durant les vingt premières minutes. Les troupes devaient sortir sans friction des hélicoptères pour que le plan fonctionne. Il attendait donc anxieusement que le premier CH-47 atteigne sa zone d'atterrissage reçue.

Le leader du groupe d'Apache, le Chief Warrant Officer 3 Rich Chenault et son coéquipier, le capitaine Joe Herman, tous deux du 3e bataillon du 101e régiment d'aviation, surveillaient les lignes de crêtes et les sommets des collines tout en volant à pleine vitesse au-dessus de la vallée de Shah-i-Kot, dans leur hélicoptère d'attaque AH-64 Apache. Doté d'un formidable éventail d'armes – comprenant un canon de 30 mm, des missiles Hellfire et des roquettes de 70 mm – leur appareil était l'un des cinq Apaches à pénétrer dans la vallée avant l'aube du 2 mars. Secondés par un autre Apache piloté par le CWO 3 Keith Hurley et le WO Stew Content, ils scannaient l'horizon autour d'eux à la lueur de l'aube, et surveillaient chaque zone d'atterrissage désignée. Ils n'apercevaient rien d'anormal. Le village de Sherkhankel avait l'air désert en-dessous d'eux, et la ligne de crête séparant la vallée vers l'est ne portait qu'une végétation éparse et une mince couche de neige. Toute la vallée était endormie.

Les Chinooks étaient seulement à 10 minutes de vol lorsque le CWO3 Chenault transmit le mot code "Ice" (aucun signe ennemi dans la zone d'atterrissage ou à proximité), et les CH-47 plus grands et plus lents émergèrent des nuages et descendirent dans la vallée vers leurs objectifs respectifs. Chenault et son ailier, le CWO3 Hurley, observaient les éléments de la 101e – la Task Force Raider – sortant de leur CH-47 dans la moitié nord de la vallée, pendant que les 3 autres Apache du Team Two survolaient le reste des hélicoptères de la 159e brigade d'aviation en train de déposer des éléments du la 10e division de montagne – Task Force Summit – à proximité de la position d'arrêt Ginger au sud.

Embarquement dans un CH-47 durant l'opération Anaconda

L'heure H, l'atterrissage du premier appareil, avait passé sans aucun incident. Tous les soldats de la première vague étaient en sûreté au sol, sans contact avec l'ennemi, et les CH-47 reprirent leur vol de retour. Jusqu'ici, la mission se déroulait comme prévu. Le colonel Wiercinski était soulagé, sans savoir que l'enfer était sur le point de se déclencher.

En fait, les préparatifs de l'opération Anaconda avaient commencé des semaines avant le jour J. Le renseignement américain avait détermine qu'un nombre important de Taliban et de membres d'Al-Qaïda opéraient dans la vallée de Shah-i-Kot, à l'est de Gardez, près de la frontière pakistanaise. A l'intérieur de la vallée se trouvaient 3 villages : Sherkhankhel, Babukhel et Marzak. Anaconda était conçue pour empêcher les forces taliban et d'Al-Qaïda de s'échapper de la vallée.


«... Il fut décidé de procéder à une insertion à l'aube pour surprendre l'ennemi tout en fournissant une visibilité optimale aux forces entrant dans la vallée. »


L'effort principal de la mission consistait pour les forces afghanes du colonel Zia Lodin à prendre la vallée de Shah-i-Kot à partir de l'ouest, là où le terrain était dominé par une ligne de crête surnommée "la baleine", en bénéficiant d'un appui aérien rapproché coordonné par des forces spéciales coalisées. Les troupes régulières de la 101e aéromobile et la 10e de montagne, représentant les deux moitiés de la Task Force Rakkasan, appuieraient l'effort principal en s'emparant des issues à l'est de la vallée. La 101e devait occuper le versant nord des positions d'arrêt : Amy, Betty, Cindy et Diane ; la 10e en ferait de même au sud, avec Eve, Ginger et Heather. Le PC de brigade du colonel Warcinski devait également se trouver sur le versant sud de la vallée, près de Ginger. Des détachements de forces spéciales coalisées, appartenant à la Task Force K-BAR, effectueraient des reconnaissances dans les secteurs voisins, pendant que les forces spéciales australiennes – Task Force 64 – opèreraient au sud de la vallée pour empêcher des éléments ennemis de s'enfuir dans cette direction.

Le jour J avait été initialement fixé au 25 février, mais le mauvais temps et les égards pour des jours sacrés islamiques l'avaient reporté au 2 mars. Les soldats aéroportés de la coalition devaient parvenir au sol juste après le lever du soleil. Ce fut l'objet de nombreuses discussions lorsque les planificateurs de la mission évaluaient les options consistant à attaquer dans la pénombre ou dans la journée. Finalement, il fut décidé de procéder à une insertion à l'aube pour surprendre l'ennemi dans son sommeil tout en fournissant une visibilité optimale aux forces entrant dans la vallée. Selon le remplaçant du colonel Wiercinski, le lieutenant-colonel Jim Larson, "nous avions déterminé que la partie la plus dangereuse de l'opération serait l'insertion des forces au sol. Nous savions pouvoir tuer l'ennemi s'il se montrait, de sorte que nous pensions que le risque d'un hélicoptère s'écrasant à 2700 m d'altitude sur un terrain rude et mal connu était plus grand."



L'arrivée des Apaches

Même avant l'heure H, les troupes du colonel Zia et les forces spéciales appuyant leur mission commencèrent à s'effilocher. Un groupe était fixé par des feux de mortiers au sud-ouest de la vallée, alors qu'un autre groupe était engagé de la partie nord-est de la Baleine. Le Team One des Apaches, les hélicoptères des CWO3 Chenault et Hurley, quittèrent leur position surélevée avec la 101e dans le secteur nord et mirent le cap au sud-ouest. Hurley remarqua que des soldats du colonel Zia était en train de se retirer vers Gardez. Chenault écouta également la description de la cible lorsque les deux Apaches survolèrent les forces spéciales pour avoir une identification positive des forces amies. "Ils nous ont donné les coordonnées de leur emplacement", a raconté Chenault. "Nous avons cessé de tourner en rond et sommes allés là où ils étaient, et nous les avons identifiés en les survolant. Ils nous ont ensuite donné la direction et la distance du feu qu'ils recevaient. Nous avons volé une fois dans ce secteur pour essayer d'avoir une identification visuelle de l'ennemi, et une fois que leur position a été reconnue, nous sommes revenus en arrière pour faire deux passes avec les deux appareils." Chenault tira un barrage de roquettes sur le mortier à son passage suivant. L'Apache de Hurley le suivait pour le couvrir, puis Hurley fit sa propre passe sur la position du mortier. Le feu ennemi cessa, mais ils survolèrent encore une fois la position pour en être certains.

Apache durant Anaconda

Les radios commencèrent à être surchargées. Le capitaine Herman, le coéquipier de Chenault, se rappelle : "Les radios étaient plutôt agitées. Nous parlions ; nos équipiers parlaient également à 2 éléments différents au sol ; et le groupe de 3 Apaches au sud parlaient à des éléments dans leur secteur. Le relief bloquait certaines transmissions radio en raison des hauteurs, mais parfois il y a avait des recouvrements et vous pouviez entendre les deux côtés d'une bataille en même temps." Le CWO 3 Bob Carr, qui a rejoint plus tard le groupe de Chenault, ajoute que "le trafic radio était énorme car tout le monde voulait des missions de feu, et il était difficile de suivre le rythme et de déterminer l'emplacement de l'ennemi."


«... Hurley aperçut alors un homme isolé pointant un RPG sur son hélicoptère. Le projectile émergea du lance-roquettes portable et fonça vers l'appareil, avant d'exploser derrière. »


Le groupe de Chenault répondit ensuite à une autre équipe de forces spéciales prise sous un feu de mortier dans la partie nord-est de la Baleine. Le trou du mortier à droite du CWO3 Hurley, très bas sur l'horizon, et il ne pouvait engager ses armes. Hurley aperçut alors un homme isolé pointant un RPG sur son hélicoptère. Le projectile émergea du lance-roquettes portable et fonça vers l'appareil, avant d'exploser derrière. Hurley appuya à droite et visa la position du mortier, bien que seuls 2 à 3 ennemis entouraient le tube. Chenault redressa son appareil, pressa la détente et projeta 6 roquettes de 70 mm sur la position. Il put voir les hommes courir en vain pour s'éloigner du feu. Lorsque l'appareil de Chenault acheva sa passe, Hurley tira des obus de 30 mm sur 5 individus courant de droite à gauche devant lui. Le canon de 30 mm à court de munitions, il engagea plusieurs roquettes.

Soudain, l'appareil de Hurley fut abruptement secoué par un coup direct de RPG, qui frappa les munitions de l'aileron droit et arracha 3 missiles Hellfire. Plus d'une dizaine de balles de petit calibre pénétrèrent également dans l'appareil. Les balles traçantes sifflèrent autour des 2 Apaches, et tous deux subirent de multiples impacts. Un coup traversa soudain le cockpit de Hurley et se logea dans la console avant de l'appareil, projetant une pièce d'équipement dans la jambe du Warrant Officer 1 Content assis sur le siège avant.

Les deux hélicoptères devaient rompre à droit, mais Hurley, touché par des armes légères et un RPG, tourna à gauche et disparut par-dessus la ligne de crête. Il explique : "Alors que je redescendais le versant sud de la Baleine pour essayer de sortir de la zone adverse, je n'ai pas pu établir le contact avec mon leader [Chenault], parce qu'il était passé de l'autre côté de la crête, de sorte que le contact visuel était perdu."

Chenault et Herman fouillèrent le ciel de manière frénétique et essayèrent de joindre leur ailier sur le réseau. Ils avaient perdu la situation de son appareil, et le capitaine Herman redoutait qu'ils aient été abattu au-dessus du territoire hostile. "Il nous fallut plusieurs minutes pour découvrir exactement où ils étaient", raconte-t-il. "Nous essayions évidemment de trouver leur emplacement afin de pouvoir les aider si leur engin s'était écrasé, ce qui n'était pas le cas."

Pendant Anaconda, les communications entre les Apaches et les unités terrestres passaient principalement par des radios FM sûres. Celles-ci ont deux niveaux de sécurité, car elles conjuguent un système de cryptographie à un émetteur-récepteur à évasion de fréquence. De plus, les Apaches communiquaient l'un avec l'autre par leurs radios VHF standards. Les deux types de radios sont limités par le contact visuel, de sorte que si appareil plonge derrière une montagne pendant une passe, l'ailier peut perdre le contact s'il n'est pas à proximité. Et il y avait de nombreuses crêtes montagneuses et maintes plongées durant Anaconda.



Premier round: un feu intense

Pendant ce temps, près la position d'arrêt Ginger, la 2e section du 1er bataillon conduite par le sergent Darren Amick au sein de la TF Summit, et issue du 87e régiment d'infanterie de la 10e division de montagne, venait de débarquer de l'hélicoptère lorsqu'elle fut pris sous le feu d'une mitrailleuse placée sur la ligne de crête à l'est. Les hommes se débarrassèrent de leur sac à dos et établirent un périmètre avec des positions de tir. L'appui aérien rapproché était déjà demandé, et les jets US commencèrent à pilonner la ligne de crête menaçante avec des bombes guidées JDAM (pour Joint Direct Attack Munitions). Pendant un instant, l'ennemi fut contraint au silence. Amick et ses hommes ramassèrent leurs sacs et commencèrent à faire mouvement au nord sous la couverture du bombardement. Mais ils ne firent que 50 mètres avant que le monde ne recommence à entrer en éruption, avec le feu de mitrailleuses et de snipers provenant de multiples positions.

Le sergent Amick déplaça ses hommes jusqu'à une ligne de crête à l'est, pour appuyer la 1ère section et le PC de bataillon. Alors qu'ils avançaient, des Apaches foncèrent au-dessus, tirant des missiles Hellfire sur la ligne de crête. Les hommes d'Amick étaient trop près. Un Hellfire frappa le flanc de la montagne à moins de 100 mètres de leurs positions, envoyant des éclats de toutes les directions. L'un de ses hommes sentit une douleur aiguë au menton et se rendit compte qu'il avait été frappé par des débris de missile. Rapidement, Amick retira son groupe de la ligne de crête, et retraita pour laisser les Apaches faire leur travail sur les positions ennemies – et éviter un autre cas de feu ami.

Débarquement des Chinook à Shah-i-Kot

Le feu dans l'espace aérien au-dessus de la position d'Amick était tout aussi intense. Les 3 Apaches du Team Two avaient subi de multiples impacts et étaient à court de carburant. Des RPG passaient au-dessous, au-dessus et devant eux à chaque passage. L'un frappa directement l'Apache du CWO4 Jim Hardy et mit hors service tout le système d'armes. L'appareil était capable de faire du vol stationnaire et d'agir comme plate-forme d'observation, mais était sinon hors de combat. Les 2 Apaches restants continuèrent à tirer sur les positions ennemies. Soudain, un missile sol-air – probablement un Strela-2 – émergea du flanc de la montagne et vola vers un chasseur-bombardier loin au-dessus. Bien que le missile manqua sa cible, son lancement accentua le caractère dramatique de la situation.


«... Ils ne firent que 50 mètres avant que le monde ne recommence à entrer en éruption, avec le feu de mitrailleuses et de snipers provenant de multiples positions. »


Le capitaine Baldazar conduisit ses hommes hors du Chinook et dans leur propre combat. Le CWO3 Chenault répondit à leur demande d'appui. L'Apache endommagé du CWO3 Hurley rejoignit celui du CWO4 Hardy, et tous deux sortirent de la vallée pour gagner la position de ravitaillement avancée, à une demi-heure de vol de là. Bien qu'il n'y avait pas d'autre option, Chenault redoutait que s'il venait à être abattu, la TF Raider serait laissée sans appui aérien rapproché, et que personne ne pourrait le trouver et couvrir sa position au lieu du crash. Lorsqu'il arriva sur la position de Baldazar, il y avait un déluge de feu de mortiers et de RPG en-dessous. Bien que Chenault ne put voir l'ennemi, il déclencha un feu de couverture sur les positions suspectées de manière apparemment efficace, permettant à Baldazar et à ses hommes de continuer à avancer.

Selon le capitaine Butch Whiting, l'officier de liaison pour l'aviation d'attaque au PC de la TF Rakkasan, les Apaches "devaient s'approcher tout très de l'ennemi – parfois entre 200 et 300 mètres – non seulement pour distinguer et engager les cibles, mais également pour prévenir les tirs fratricides. L'ennemi était très bien camouflé, et il était également très bien protégé en se cachant dans les crevasses et d'autres rochers. Mais nous étions en mesure d'avoir une précision exacte par l'intermédiaire des hommes au sol. Ils étaient capable de nous diriger sur la cible, ce qui nous permettait détruire l'ennemi rapidement et précisément."

Le capitaine Baldazar et ses hommes recevaient alors du feu à la fois de l'est et de l'ouest de leur position. Ils se trouvaient dans un dilemme, similaire à celui de la TF Summit au sud. Le CWO3 Chenault était conscient du danger représenté par les pertes dues au feu ami, et le feu d'appui venait lentement, car l'équipage de l'Apache essayait de distinguer les amis des ennemis. Il commençait également à manquer de munitions, et les cibles à combattre restaient nombreuses. Son engagement sur zone à peine terminé, Chenault rejoignit avec les 2 appareils restants du Team Two, qui opéraient au-dessus de la TF Summit, et tous trois sortirent de la vallée.

Avec les Apaches hors du combat, les TF Summit et Raider devaient entièrement se fier à l'appui aérien fourni par les bombardiers et chasseurs de l'Air Force et de la Navy volant loin au-dessus de la vallée, où la bataille gagnait en intensité.



Deuxième round: 4 out, 2 OK

A la position de ravitaillement avancée, le CWO3 Carr écoutait à la radio les discussions des Apaches engagés et attendait son tour d'entrer dans la bataille. Il avait prévu de prendre sa retraite en février, mais avait été placé en "stoploss" [l'arrêt des départs] après le 11 septembre. Il n'était pas parti avec les cinq premiers Apaches, parce que son canon de 30 mm avait une fuite hydraulique. A présent, avec son canon réparé, il attendait et observait les Apaches endommagés revenus de la vallée. Quatre d'entre eux étaient tellement criblés de balles qu'ils ne pouvaient plus reprendre le combat, et un nouveau groupe de deux appareils fut assemblé avec les Apaches des CWO3 Chenault et Carr.

"Si tu restes en vol stationnaire, tu y resteras, alors bouge et tire", raconta Chenault à Carr. Ce dernier n'avait jamais été entraîné à des tactiques de tir en mouvement, et sa vie et ceux des soldats au sol dépendaient maintenant d'elles. De plus, il devait engager des cibles à partir de son propre siège arrière, parce que l'approche coordonnée standard siège avant/siège arrière prenait plus de temps qu'il n'en aurait dans la bataille. Il n'avait alors jamais tiré de roquette à partir du siège arrière. En vol vers la vallée, il "alluma" ses roquettes, mais pour une raison inconnue il ne pouvait avoir un curseur de direction. Après quelques essais infructueux, il pressa par frustration la détente, sans remarquer que ses nacelles de roquettes étaient pointées vers le bas. La roquette émergea de la nacelle et frappa le sol, avant de ricocher juste devant le cockpit. "Merde – je me suis presque descendu moi-même", pensa-t-il anxieusement. Il continua de manipuler les commandes et fut finalement capable d'avoir son curseur de direction.

Le colonel Wiercinski – RAK 6 – et son état-major surveillaient le combat à partir de leur PC tactique de brigade, à bord de deux UH-60 Black Hawks, 300 mètres au-dessus de la vallée. Il écoutait différents réseaux radio et était en communication avec ses commandants au sol, les Apaches et même les avions de l'Air Force et de la Navy loin au-dessus, ce qui lui permettait de contrôler le champ de bataille à partir d'une position mobile. RAK 6 avait également une zone d'atterrissage désignée, et il virait pour se déployer.

Dégâts sur un Apache durant l'opération Anaconda

C'était un emplacement serré, et il n'y avait de place que pour un seul Black Hawk dans la zone d'atterrissage. L'un devait toucher le sol, déposer sa cargaison humaine et décoller avant que le second puisse approcher de manière similaire. Durant le second tour de l'approche, l'hélicoptère de tête commença à prendre des coups d'armes légères, Kalachnikovs et mitrailleuses PK. Tic, tic, tic fut tout ce qui put être entendu sur le bruit des pales et de la radio décrivant l'état du combat en-dessous. Puis, juste avant de toucher le sol, un RPG explosa sous le Black Hawk et envoya des éclats dans la carcasse, directement sous le siège du pilote. Ce dernier parvint à poursuivre l'approche et déposer en sécurité la moitié du PC tactique de la brigade avant de repartir. Le second appareil suivait immédiatement avec le reste du PC.


«... Les Apaches endommagés revenus de la vallée, quatre d'entre eux étaient tellement criblés de balles qu'ils ne pouvaient plus reprendre le combat. »


Un déluge de feu constant s'abattit sur le PC dès que celui-ci atterrit, de sorte que RAK 6 et les autres se mirent à couvert derrière un rocher affleurant à partir duquel ils avaient une position avantageuse pour voir la position d'arrêt Ginger jusqu'au village de Marzak. Les balles sifflaient et claquaient au-dessus des têtes, et le PC commença à tirer à leur tour. L'intensité du feu ennemi s'accrut, et ils appelèrent les Apaches pour en venir à bout. Durant les 18 heures qui allaient suivre, le PC devra se déplacer plusieurs fois pour éviter d'être submergé.

Lorsque l'équipe réorganisée d'Apaches entra dans la vallée, le CW3 Carr, en tête, reçut immédiatement la mission de faire taire le feu ennemi sur RAK 6 et le PC tactique, qui était toujours fixé par le feu de mitrailleuses et de RPG. Carr ne pouvait pas déterminer qui était ami et qui ne l'était pas, et RAK 6 posa un panneau orange VS-17 indiquant leur position. A cet instant, Carr remarqua une traînée de fumée approchant de son appareil. Ils subissaient le feu de RPG. Carr fit pivoter l'hélicoptère vers la position et alluma la ligne de crête avec son canon 30 mm. Le feu décrut pour un instant, mais les deux appareils durent faire plus de sept passes d'attaque avant que le feu ennemi sur le PC tactique ne cesse définitivement.

Ils recevaient maintenant des demandes répétées d'appui de la part de la TF Summit à la position d'arrêt Ginger. C'était un endroit traître, une vallée étroite d'une largeur d'un seul kilomètre avec des hauteurs aussi bien à l'est qu'à l'ouest. Chaque instant dans le secteur signifiait traverser une volée de feu RPG. Le CWO3 Chenault compta jusqu'à 5 détonations autour d'eux en même temps : "A notre cinquième passage, nous encaissions un feu assez intense sur le côté droit de la carcasse. Lorsque cela s'est produit, nous avons perdu nos capacités nocturnes, et mon équipier ne pouvait plus tirer." En fait, Chenault avait perdu son optique pour l'acquisition de cible et son capteur de vision nocturne. Il appela RAK 6 pour l'informer de l'état de son appareil. RAK 6 ordonna à Carr et à Chenault de retourner à la position de ravitaillement avancée pour voir ce qui pourrait être fait.

La TF Summit se battait depuis des heures, et les pertes commençaient à s'accumuler. Le sergent Amick pouvait entendre les obus des mortiers ennemis sortir du tube lorsqu'il se couchait et priait pour que le coup n'atterrisse pas sur eux. Un sniper ennemi prit de flanc par la gauche la position d'Amick et toucha l'un de ses soldats en pleine poitrine, le projetant au sol, bien que son gilet pare-balles empêcha une blessure sérieuse.

Amick aida les blessés à atteindre le point de rassemblement des blessés lorsque son unité se redéploya vers le PC de Summit. Toutefois, les obus de mortiers commencèrent à se rapprocher rapidement des blessés. Deux obus explosèrent au milieu d'eux, le deuxième presque sur le premier. La plupart des blessés reçurent des éclats pour la seconde fois. L'ennemi encadrait leur position. Les hommes d'Amick ouvrirent le feu partout où ils pensaient que les observateurs avancés de l'ennemi pouvaient se trouver – chaque buisson, chaque rocher surplombant, n'importe où quelqu'un pourrait se cacher. Apercevoir la cible et éliminer l'ennemi était essentiel. Ils devaient venir à bout de ces mortiers.

Une mitrailleuse se mit à tirer à partir de Marzak au nord. Trois soldats furent immédiatement blessés, prenant des balles dans le pied, la jambe et les fesses. Alors qu'ils réagissaient, du feu parvint à partir du sud. L'ennemi les avait pris de flanc, et la TF Summit était maintenant prise entre deux feux. Le sergent Amick ouvrit le feu, tirant des obus explosifs avec son lance-grenades M-203. Le feu ennemi cessa. Il était bon de réduire la position suspectée au silence. "Cela fait un type de plus qui ne va pas me tirer dessus", pensa Amick avec une sombre satisfaction. "Où était l'appui aérien rapproché ?", cria-t-il. Une réponse vint de la radio, "l'appui aérien est en route – cinq minutes." "Mon Dieu, cinq minutes ?", rétorqua Amick.



Troisième round: le dernier vol

Le CWO3 de Charlie Company, Sam Bennett, n'avait pas prévu d'être engagé au jour J. Il était resté avec le reste de son unité à Kandahar, mais avec presque tous les Apaches de la compagnie Alpha hors de combat, son appareil fut mobilisé. Il effectua la liaison avec les appareils des CWO3 Chenault et Carr à la position de ravitaillement avancée pour le guider dans la vallée. La nouvelle équipe de trois appareils retournait avec deux objectifs. Premièrement, elle continuait à fournir des attaques à courte distance pour les troupes des TF Summit et Raider. Deuxièmement, l'équipe devait assurer qu'une troisième vague pourrait accéder à ses zones d'atterrissage. Elle était censée arriver juste après le crépuscule pour renforcer les éléments au sol et procéder à l'extraction des blessés.

Bennett avait été briefé sur ce qu'il devait attendre, mais était stupéfait lorsqu'il observa l'appareil de tête faire la première passe dans le feu ennemi. Plusieurs RPG passèrent derrière le premier appareil, tombèrent court, et un autre fonça entre les deux suivants. Des traînées de fumée blanche, la plupart d'entre elles provenant d'une ligne de crête occidentale près de Marzak, montraient la trajectoire que les RPG avaient prises.

A présent, le soleil était si bas sur l'horizon que chaque arme orientée à l'ouest lui faisait directement face, rendant impossible toute précision. Les pilotes essayèrent sans grand succès de venir à partir du sud. Ils virèrent ensuite au sommet d'une colline, désignée Ginger Mountain, pour avoir un meilleur angle sur l'ennemi situé dans la petite vallée en contrebas. Lorsque Chenault traversa la ligne de crête, il entendit Bennett hurler à la radio, "Hey, tu viens d'être touché par un RPG dans ton rotor arrière !"

Avant qu'il ait le temps de méditer sur l'appel radio de Bennett, il remarqua le feu de l'artillerie antiaérienne frôler sa verrière. Pour la première fois, Chenault commença à avoir peur. Ils avaient déjà reçu plus d'impacts que plus tôt dans la journée, et avec de la DCA les conditions ne faisaient qu'empirer. Ils sortirent par le sud et décidèrent de revenir par le nord. Ayant enfin trouvé un meilleur accès, les Apaches s'écartèrent et firent un tour pour revenir encore une fois par le nord.

Chinook durant Anaconda

Cette fois, ils échangèrent leurs positions. Carr devait entrer le premier dans la vallée, puis l'appareil de Bennett et celui de Chenault. Ce dernier aperçut un soldat isolé tirer un SA-7. "Nous avons fait une passe à travers la vallée elle-même et essayer de réduire au silence cette ligne de crête d'où Summit 6 subissait un feu d'enfer. Un type tira un SA-7 sur mon appareil, mais il passa par-dessus et autour de la queue avant de s'écraser au sol. Je suppose donc que l'AN/ALQ-144, qui constitue notre équipement de protection contre les SA-7 et les Stingers, a fonctionné." Chenault abattit ensuite violemment et tira 50 obus sur la position de lancement du missile.



«... L'heure H était alors passée depuis presque 20 heures – 20 heures de combat ininterrompu. La TF Summit avait perdu 27 soldats sur 82. »


Toujours sous un feu intense, RAK 6 écoutait le trafic sur le réseau et réalisa non seulement que les Apaches ne pourraient avoir d'effet, mais qu'en plus les renforts volant en-dehors de la zone de l'objectif ne pourraient plus déposer ou larguer du ravitaillement sur sa position ou sur celle de la TF Summit. Il les appela, et les CH-47 retournèrent une fois de plus à la base de Bagram.

Le soleil s'était alors couché, et chaque fois que le groupe d'Apache volait dans la vallée étroite près de la position d'arrêt Ginger, l'ennemi semblait avoir rassemblé davantage d'armes contre eux. Comme Chenault n'avait plus de vision nocturne, le groupe décida de retourner à la position de ravitaillement avancée. "Il faisait sombre et Chenault avait son système nocturne hors service, de sorte qu'il ne pouvait pas retourner de nuit. Il finit par utiliser les lunettes du siège arrière pour la navigation, ce qui était un vrai défi dans les montagnes." Suivant les deux autres appareils, Chenault parvint à sortir de la vallée, par-dessus les cols, jusqu'à la position de ravitaillement. Il n'y aurait plus d'appui avec les Apaches durant la nuit. La TF Summit devrait à présent se fier aux canonnières AC-130 et aux avions rapides pour leur fournir l'appui aérien rapproché.

Après le départ des Apaches, les chasseurs-bombardiers larguèrent JDAM sur JDAM sur la ligne de crête à l'ouest et d'autres positions ennemies suspectées autour du PC de brigade et de la TF Summit. Mais l'ennemi avait bien préparé ses positions de mortiers, noyant les plaques de base dans du béton. Chaque fois que les bombardiers survolaient leurs positions, ils démontaient les mortiers et couraient à l'intérieur de leurs caves et de leurs bunkers, en ressortant lorsque la frappe était terminée.

Finalement, après un jour complet de pilonnage, le feu des Taliban commença à diminuer. Des préparatifs furent effectués pour ramener les Chinooks et extraire le PC et la TF Summit. Au nord, la TF Raider devait rester dans la vallée et attendre des renforts.

RAK 6 écoutait les communications radio et attendait ses CH-47 en approche. Ce serait la dernière vague de l'extraction, et il quitterait la vallée avec les derniers éléments restants de la TF Summit. L'heure H était alors passée depuis presque 20 heures – 20 heures de combat ininterrompu. La TF Summit avait perdu 27 soldats sur 82, bien que miraculeusement aucun n'ait été tué. Cinq des sept Apaches engagés dans la vallée avaient subi des dommages importants, mais pourraient à nouveau voler.

Le jour J, le 2 mars, fut une sombre et sale affaire dans un terrain mal connu, y compris les aspects électroniques de l'opération impliquant les soldats au sol et les Apaches au-dessus. Avoir des "yeux sur la cible" se faisait de manière visuelle, à des distances où l'ennemi n'était souvent qu'à quelques centaines de mètres. Les soldats signalaient les positions suspectées, et les Apaches au-dessus reciblaient les objectifs avant de déclencher un barrage de feu. Ceci était compliqué par intermittence par les radios à contact visuel utilisées dans un terrain rude et vertical. A la fin de la journée, sous le couvert des ténèbres, la TF Summit fut extraite en vertu de l'adage "nous possédons la nuit." Toutefois, les Apaches n'étaient pas invulnérables, et la perte du système de vision nocturne de Chenault força les autres appareils à quitter le champ de bataille pour le guider de retour à la base.




Texte original: Michael Puttré, "Operation Anaconda was a 'back to basics' campaign for US combat helicopters",
Journal of Electronic Defense, September 02    
Traduction et réécriture: Maj EMG Ludovic Monnerat    






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