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Kosovo: l'OTAN se tient prête à intervenir, mais la pression militaire a ses limites

31 janvier 1999


Les enterrements, ici celui d'un policier serbe tué fin janvier, rythment les journées au Kosovo

Depuis le 28 février 1998, dates des premiers affrontements armés, le conflit du Kosovo a fait près de 2000 morts et provoqué la fuite de 300'000 personnes; après une accalmie en raison des pressions occidentales en octobre dernier, les accrochages, attentats et assassinats se sont multipliés durant le mois de janvier.

Pressée d'intervenir, l'Organisation pour le Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) déploie ses moyens, raccourcit son processus de décision mais laisse entrevoir les limites de l'action militaire.


Un processus de décision rapide

L'OTAN a autorisé samedi son secrétaire général Javier Solana à engager si nécessaire des frappes en Yougoslavie. En fonction de l'évolution de la situation dans la province serbe et du processus politique engagé par le Groupe de contact (Etats-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne, l'Allemagne, la France et l'Italie), Javier Solana pourra décider d'une intervention aérienne contre des cibles serbes après une dernière "consultation" des alliés.

De 96 heures au début de l'année, le délai d'intervention de l'OTAN avait déjà été ramené à 48 heures; cette dernière "consultation" avant un passage à l'action ne nécessitera pas de réunir le Conseil de l'OTAN et pourra se faire très rapidement, les militaires allant recevoir des instructions pour réagir immédiatement en cas de nécessité. Plusieurs nations se sont par ailleurs déclarées prêtes pour une intervention terrestre: le doigt occidental est virtuellement prêt à presser la détente.


Sur la base italienne d'Aviano, les F-16 de l'OTAN sont prêts

Déploiement des forces

Afin de correspondre aux exigences en terme de délai d'intervention, l'OTAN a parallèlement renforcé sa présence militaire: la France a fait appareiller le groupe aéronaval du Foch, qui a rejoint la 6e flotte américaine et d'autres navires occidentaux déjà présents en Adriatique, alors que 13 membres de l'Alliance ont envoyés des avions de combat supplémentaires sur leurs bases aériennes d'Amendola et d'Aviano en Italie.

Au total, près de 200 chasseurs, chasseurs-bombardiers et avions d'appui sont prêts a décoller. Les plans opérationnels pour des frappes aériennes limitées contre des cibles serbes ont été remis à jour; parmi les objectifs recensés par l'OTAN figurent notamment des batteries de défense antiaérienne, des aérodromes, des centres de commandement et des entrepôts militaires de l'armée serbe. Enfin, plusieurs nations européennes - France, Grande-Bretagne, Allemagne - se sont déclarées prêtes à un déploiement terrestre.

L'OTAN a planifié dès la mi-98 différents scénarios d'intervention militaire au Kosovo, qui vont des frappes aériennes limitées à un déploiement terrestre massif. Au nombre de cinq, ces scénarios restent d'actualité.


Deux scénarii d'intervention aérienne

  • raids aériens limités: la majeure partie des membres de l'Alliance considère qu'un recours à des raids limités n'aurait aucune influence sur l'évolution de la situation. Les Européens citent à cet égard l'opération Renard du Désert qui a été menée en Irak par les Américains et les Britanniques. Les Etats-Unis estiment au contraire que des raids limités sur des cibles bien choisies (dépôt d'armement, batteries de missiles antiaériens, centres de communication) auraient valeur de coup de semonce.


  • campagne aérienne massive: elle viserait les mêmes cibles que précédemment, en étant étendue à des casernes, des bases aériennes, non seulement au Kosovo ou proches de la province serbe mais aussi dans l'ensemble de la Serbie. Toujours pour une majorité d'Européens, une telle campagne n'a d'intérêt que si elle est suivie d'un déploiement terrestre.

L'intervention terrestre, comme ici en Bosnie, est envisagée au Kosovo

Trois scénarii d'intervention terrestre

  • 36.000 hommes seraient nécessaires pour garantir un accord de cessez-le-feu qui serait accompagné d'un accord de paix. Dans cette hypothèse, la force d'extraction (1.800 hommes) déployée en Macédoine servirait probablement d'élément précurseur à une occupation massive du terrain. Au préalable, un accord explicite de Belgrade est obligatoire. Il semble cependant improbable en l'état actuel des choses.


  • 60.000 hommes seraient requis si aucun accord de paix n'est conclu et qu'il s'agit seulement de garantir un cessez-le-feu. Dans cette hypothèse aussi, un accord des autorités yougoslaves est indispensable. Accepter une présence militaire de l'OTAN dans une de leurs provinces équivaut pour Belgrade à accepter un abandon de souveraineté et les autorités yougoslaves pourraient préférer un renforcement substantiel de la présence de l'OSCE.


  • 200.000 hommes seraient nécessaires pour "imposer" la paix au Kosovo, en l'absence de tout accord de cessez-le-feu et de plan de paix agréé par les deux parties. Ce serait une déclaration de guerre à Belgrade. Cette option est considérée militairement comme la plus dangereuse et la plus difficile à mettre en œuvre en raison d'une région semi-montagneuse et ne disposant pas d'infrastructures (aéroports, axes routiers notamment) très développées.

Avant le début de tout déploiement terrestre, l'OTAN aurait à détruire, via une campagne aérienne massive, toute la défense antiaérienne serbe et neutraliser les capacités principales de l'armée de Slobodan Milosevic.


Les risques de l'option militaire au Kosovo

Plus que les pressions diplomatiques, une action militaire unilatérale et délibérée semble la seule capable de faire plier Slobodan Milosevic. Mais les choses sont compliquées par la présence sur le terrain de quelque 800 observateurs internationaux. Ces vérificateurs, basés essentiellement à Pristina, Pec, Prizren et Kosovska Mitrovica devraient être évacués - probablement vers la Macédoine voisine - préalablement à toute frappe. Cette opération pourrait toutefois être menée rapidement par la force d'extraction basée en Macédoine et commandée par la France.

Une action militaire se heurte également à deux risques: celui de renforcer le soutien populaire de Slobodan Milosevic en Serbie et d'être interprété comme une aide aux rebelles albanais. En outre, personne ne peut vraiment prédire les conséquences d'une attaque aérienne. Les expériences irakienne et bosniaque montrent que l'on ne fait pas uniquement la guerre avec des avions mais aussi avec des hommes sur le terrain.


L'intervention de l'OTAN est réclamée depuis longtemps par l'Albanie

Le manque de moyens de pression sur l'UCK

A la différence de la Bosnie en 1995, les menaces de l'OTAN, si elles conservent un effet certaines sur les Serbes, restent vaines ou presque sur leurs opposants, en l'occurrence les maquisards rebelles de l'UCK. Comme ceux-ci vivent au sein de la population, comme ils n'ont ni caserne, ni base fixe, ni lieu de regroupement, ni installation militaire lourde et mènent une guerre de harcèlement, les raids aériens sont d'emblée à exclure.

La menace d'un blocus n'effraie guère les combattants indépendantistes, dont les voies d'approvisionnement sont nombreuses et diverses, passant même par la Serbie. La prise de contrôle par des soldats occidentaux de la frontière avec le Kosovo, dans le nord de l'Albanie, a également été évoquée, mais la perspective de déployer des troupes dans ces régions montagneuses et reculées, où règnent des clans armés jusqu'aux dents, ne déchaîne pas l'enthousiasme dans les états-majors.

Enfin, la menace de gel des comptes bancaires utilisés pour collecter les fonds de la diaspora albanaise, qui finance l'UCK, n'impressionne pas les indépendantistes. Selon les services de renseignement occidentaux, les mafias albanaises en Europe et aux Etats-Unis, expertes depuis des années dans le blanchiment et les transferts discrets de l'argent de la drogue et de la prostitution, participent activement à l'approvisionnement en armes de l'UCK.


Une seule solution: la paix

Pour l'OTAN, la seule solution crédible pour l'engagement de troupes, à l'exemple de la force de stabilisation (SFOR) en Bosnie, ne peut donc qu'être consécutive à un accord de paix. Or, un tel d'accord, ni les Serbes qui ont repris l'offensive au mois de janvier, ni les combattants de l'UCK qui contrôlent près d'un tiers du territoire du Kosovo, ne semblent en accepter l'augure.

Croatie, Bosnie, Kosovo: l'embrasement successif et presque mathématique des Balkans exige pourtant une intervention franche de l'Occident. Ce qui sera difficile tant que les Etats européens croiront vain de "mourir pour Pristina", alors qu'il s'agit de défendre les idées et idéaux démocratiques sur lesquels ils reposent.


Plt Ludovic Monnerat






Sources

Communiqués de presse AP, AFP, Reuters, OTAN



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