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La rentabilité de l'instruction exige des places de tir adaptées aux simulateurs d'infanterie
10 juin 1998
Quinze semaines au lieu de dix-sept pour les écoles de recrues, cours de répétitions au rythme bisannuel pour la majorité des soldats: la réforme Armée 95 a incontestablement réduit le temps d'instruction.
Parallèlement, l'introduction de nouveaux moyens - simulateurs, instruction assistée par ordinateur (IAO), ciné-simulateur de tir - permet de compenser cette réduction; mais la rentabilité de l'instruction devient plus que jamais un objectif essentiel. Y compris lors des tirs de combat.
Places de tir sans installations: inutiles
Or, de ce point de vue, encore nombreuses sont les places de tir qui se révèlent complètement insuffisantes. Le temps des places dépourvues de toute installation est passé! Le cérémonial de la pose des cibles - F, G, H, char, héli - et des ballons impose un temps de régie bien trop élevé; de plus, le fait que toutes les cibles soient à la fois fixes et visibles, non seulement représente un criant manque de réalisme, mais en plus prive le directeur d'exercice de toute influence sur le chef exercé. Les artifices que sont l'usage de couleurs n'y changent rien.
Les prescriptions de sécurité, qui se sont resserrées ces dernières années, limitent par ailleurs le choix des emplacements pour les buts comme pour les positions; la configuration du terrain, qui doit comprendre un pare-balles suffisant, constitue souvent une insulte au bon sens. Enfin, la dépendance aux conditions météo (brouillard, neige) est encore accrue par l'altitude. Faire tirer des soldats sur quelques malheureuses cibles F plantées là depuis des heures, autour d'une cible char venue par mégarde se perdre dans un cirque montagneux jonché de pierriers: rien de plus contraire à la crédibilité et à l'efficacité de l'instruction. A oublier définitivement.
Places de tir avec installations: net progrès
Les places de tir aménagées, dotées de cibles automatiques infanterie et chars et quelques fois d'une piste mobile, toutes commandées par un boîtier dédié relié à une radio, représentent naturellement un net progrès. La mise en service des installations, effectuée par du personnel spécialisé des places d'armes, réduit considérablement le temps de régie pour la troupe. L'indication des touchés, avec le tube réducteur 7,5 mm pour Panzerfaust en plus du F ass 90, est complète; les cadres ont donc la possibilité de monter des pistes drill, individuelles ou par équipe, efficaces et motivantes.
Les exercices de tir bénéficient pour leur part d'un plus grand réalisme: la maîtrise des cibles offre aux directeurs d'exercices la liberté d'appliquer à leur guise leur plan de phase comme de récompenser - ou de punir - la troupe exercée. L'emploi de munition réelle permet, dans ce cadre, de vérifier nombre de comportements standard au niveau des soldats. De plus, l'existence d'exercices types préparés par l'encadrement professionnel donnent des outils de mesure du niveau d'instruction intéressants. L'usage de telles installations apparaît donc indispensable; mais il serait illusoire de voir là autre chose qu'une phase d'entraînement!
Des tirs de combat qui n'en sont pas
L'usage même de l'expression "tirs de combat" révèle en effet le contresens: des tirs au cours desquels les projectiles vont tous dans le même sens ne relèvent en aucun cas du combat. Il est vain de maîtriser un exercice répété dix fois utilisant des cibles qui, quoique automatiques, attendent néanmoins l'impact qui les jettera à terre: ce sont les réactions aux décisions prises par un élément humain adverse - les marqueurs - qui montrent si les comportements standards au niveau de la formation sont acquis et appliqués sous stress.
Un contrôle complet de la petite technique de combat de la troupe exercée (silhouette pas plus grande qu'une cible H, en particulier) exige d'autre part de se trouver du côté ennemi. Enfin, les tirs dits de combat actuels ne sont pas adaptés à toutes les armes - ainsi l'engin filoguidé antichar (efa) SS 77 Dragon, qui ne dispose d'aucun tube réducteur. Conclusion: les dislocations de tir "à l'ancienne", avec engagement crépitant de munition réelle toute la journée, représentent une étape importante de l'instruction. Mais parvenir à une phase d'application exige l'engagement de moyens autrement réalistes: les simulateurs.
Les simulateurs au quotidien
Ces dernières années, les systèmes de simulation se sont multipliés: dans l'infanterie, au simulateur efa datant de 1981 se sont ajoutés les simulateurs F ass 90 et Panzerfaust (1996); l'ensemble des simulateurs de terrain (par opposition aux systèmes fixes, comme le simulateur de tir pour char gren roues 93 Piranha, l'ELSALEO, le simulateur de conduite LEO ou encore le tout nouveau simulateur M-109) forme d'ailleurs un système cohérent, offrant une parfaite compatibilité avec les simulateurs fixés sur les chars de combat, chars de grenadiers ou chasseurs de chars.
De plus en plus, les simulateurs d'armes collectives sont employés quotidiennement ou presque et remplacent très rapidement le matériel de manipulation: l'existence de véhicules-cibles dédiés (Pinz pour efa, Puch pour PzF) et de moniteurs de contrôle, avec indication sonore ou visuelle des touchés et explication des ratés, autorise des heures d'instruction particulièrement efficaces. De plus, la possibilité même de toucher donne à l'indispensable drill la motivation et l'émulation propres aux concours; ce qui est encore davantage le cas avec le SIM F ass, grâce à l'engagement de marqueurs. Conséquences: ces systèmes devenant familiers à la troupe, le temps de régie qu'impliquent montage et initialisation en sont d'autant réduits.
Pour des places de tir adaptées
Les simulateurs ne peuvent toutefois être engagés n'importe où. Les places d'exercices sont souvent trop restreintes ou trop occupées - de toute manière trop connues pour obliger les cadres à de véritables prises de décision. Le choix d'un terrain non-militaire, fréquent lors d'exercices d'endurance, est incompatible avec une utilisation intensive du lieu retenu: les simulateurs ne sont en effet pas exempts de nuisances (munition de marquage, nébulogènes, éclairage pour tirs de nuit) et le trafic civil n'entre pas dans le cadre des situations tactiques exercées. Le besoin de places de tir adaptées aux simulateurs est incontestable.
De quoi s'agit-il? D'une place alternant terrain couvert et découvert, afin d'autoriser l'engagement tant du Dragon que du Panzerfaust, traversée de plusieurs voies d'accès pour véhicules-cibles (chars gren roues pour l'infanterie mécanisée) et suffisamment étendue pour permettre à une compagnie complète - contrôle de l'instruction efficace et coordination de l'engagement des marqueurs obligent - d'entraîner les comportements standards de l'infanterie aux niveaux groupe et section.
Investissements limités
Plusieurs places de tir actuelles, non dotées d'installations, se prêtent bien à pareil emploi. Les investissements à consacrer sont limités: à l'éventuel aménagement de chemins de fortune s'ajoute la mise à disposition de la troupe de cibles TAA-94 en suffisance; ces dernières étant indispensables à la création de pistes de combat aux niveaux équipe ou groupe. De la sorte, chaque unité peut suivre une instruction souple, progressive, complète et aussi réaliste que possible.
Les simulateurs représentent l'avenir de l'instruction militaire; notre armée doit se donner les moyens d'en tirer pleinement profit.
Lt Ludovic Monnerat
Notes
Tube réducteur 7,5 mm PzF: système créé par l'entreprise suisse d'armement (SW) consistant en une réplique dans la forme et le poids de la cartouche à charge creuse 95 Panzerfaust (charge tandem), équipée d'un tube réducteur utilisant une munition au calibre de 7,5 mm (cartouche d'exercice 7,5mm 92 lumineuse) développée l'entreprise suisse de munitions (SM) et reproduisant assez fidèlement le comportement du projectile réel. Faiblesse: le système, munitionné avec un coup, exige une recharge assez lente (1 minute). Retour
Panzerfaust (PzF): développé par la firme allemande Dynamit Nobel et utilisé par plusieurs forces armées (Allemagne, Italie) sous la désignation Panzerfaust 3, ce lance-roquettes consommable a remplacé dès 1994 l'ancien tube-roquettes (troq). Portée de combat optimale: 200 m contre des buts mobiles, 250 m contre des buts immobiles; vitesse maximale: 240 m/s; pénétration: plus de 70 cm de blindage acier. Retour
Efa SS 77 Dragon: engin filoguidé antichar originaire des Etats-Unis, utilisé et amélioré par l'armée suisse depuis 20 ans. Distance d'engagement: de 65 à 800 mètres. Pénètre tous les blindages connus. Retour
Simulateurs de terrain: les simulateurs efa, F ass, PzF, chars de cbt, chass chars et chars gren roues fonctionnent à base d'émetteurs lasers et de capteurs dédiés. Le sim F ass consiste en un boîtier émetteur fixé au bout du canon du fusil d'assaut et d'un gilet comprenant 14 récepteurs; chaque départ du coup émet un rayon qui, s'il touche un gilet, déclenche sur celui-ci un fort sifflement ne cessant que lorsque son porteur - hors de combat - se couche au sol. Les autres simulateurs comprennent des émetteurs, sur les armes antichars ou les canons des chars de combat, et des récepteurs sur les véhicules; en cas de touché, un gyrophare s'illumine et une cartouche fumigène orange peut être mise à feu sur le véhicule. Retour
Comportements standards: secteur d'attente, halte gardée, engagement préparé ou non préparé (efa), barrage préparé ou non préparé (fus), embuscade, raid, coup de main et point d'appui. Retour
TAA-94: système de cibles automatiques dotées de récepteurs semblables à ceux du gilet du simulateur F ass 90. Commandées par ordinateur, elles peuvent être programmées pour réagir, après délai ou non, à des boîtiers détecteurs de mouvements. Retour
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